Quand j'observe une oeuvre photographique ou une peinture, elle est silencieuse. Il y a certes un discours autour d'elle, un titre qui me prescrit une certaine lecture, un dispositif technique qui la cadre. Quoiqu'il arrive, même si cette oeuvre est entourée de légendes et de commentaires, le silence perdure. Si j'en dis quelque chose - ce que j'ai toujours le droit de faire -, il y aura distorsion, jalousie entre le visible (sans voix) et le vocable que j'aurai choisi. Je m'emparerai de l'image, je raconterai une histoire sur elle, je la nommerai, je l'interpréterai, ou bien je me soumettrai à une autre opinion, à l'autorité d'un dire quelconque. A partir de l'offre qui me sera faite, je pourrai, comme n'importe qui, m'engager dans différentes explications. Des voix multiples pourront ainsi s'exprimer, un polylogue se développer autour de l'oeuvre. L'auteur [ou les auteurs : scénario, montage, photographie, etc], titulaire des droits afférents, sera contraint de partager ces droits avec d'autres. Cette violence imposée aux auteurs est inacceptable, impardonnable, mais nécessaire. Pour que l'oeuvre soit présentable, recevable, exposable, elle est incontournable. Sa légitimité en dépend.