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Un seul mot - ou un syntagme.

         
   
Derrida, l'idiome, le style                     Derrida, l'idiome, le style
Sources (*) : Derrida, femme, différence sexuelle               Derrida, femme, différence sexuelle
Jacques Derrida - "Eperons, les styles de Nietzsche", Ed : Flammarion, 1978, p44

 

Nietzsche (Gai Savoir) -

Derrida, Nietzsche

La femme est l'écriture : elle (s')écrit, et le style (l'éperon qui ouvre un chemin - pointe, stylet) lui revient

Derrida, Nietzsche
   
   
   
Derrida, l'écriture Derrida, l'écriture
"Je m'éc." (Glas) m'auto - affecte               "Je m'éc." (Glas) m'auto - affecte  
                       

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Le titre du livre que Derrida consacre à Nietzche est Eperons, son sous-titre est Le style de Nietzsche, et le premier chapitre du livre, qui en compte treize (tous très courts) est La question du style - titre qui était celui de l'ensemble du texte lorsqu'il a été prononcé à Cerisy en juillet 1972, et qui renvoie aux travaux d'un quatuor (Sarah Kofman, Philippe Lacoue-Labarthe, Bernard Pautrat, Jean-Michel Rey). C'est aussi le thème repris dans le deuxième chapitre, Distances, une question qui ne sera développée que dans le chapitre suivant, Voiles (p37). L'écriture de Nietzsche mime la distance (Dis-tanz en allemand), c'est un effet de style. Il faut à la fois parodier le langage des philosophes et s'en distancer, de même qu'il faut se tenir à distance de la femme, de son pouvoir de séduction, son charme, sa fascination, et l'éprouver. Cette tension paradoxale, c'est son style (le style de Nietzsche et aussi celui de Derrida), son stylet.

Pourquoi éperon ? D'où vient ce mot ? C'est l'interprétation par Derrida du passage ci-contre du Gai savoir, traduit par Klossowski. Nietzsche y parle de la femme dans un "style éperonnant" (p32) c'est-à-dire un style qui tranche, perfore, ouvre un chemin, un style qui imprime sa marque, sa "puissance apotropaïque", sur quoi? Sur la question de la femme (pas la figure de la femme, comme on le dit couramment, sa question). Entre le style de Nietzsche et la femme (la femme dans le texte de Nietzsche, dans son écart abyssal), il y a échange. D'un côté l'attaque saillante, menaçante, les hurlements de cruauté à l'encontre de la femme qui laissent une empreinte, une forme, et de l'autre un souci d'apaisement, d'idéal, de félicité, une beauté fantomale, un enchantement qui plane, glisse tranquillement en silence sur les flots. Tel est le style de Nietzsche où déjà, écrit Derrida, "se dévoile la différence" (p30). Et si la différence s'y dévoile, c'est que c'est la femme qui s'écrit. "Elle (s') écrit" dans quoi? Dans l'écriture de Nietzsche. C'est à elle (la femme) que revient le style (de Nietzsche). "Plutôt : si le style était (comme le pénis serait selon Freud "le prototype normal du fétiche") l'homme, l'écriture serait la femme". En d'autres termes, si le style revenait à l'homme comme sa propriété phallique, alors, quand même, l'écriture (celle de Nietzsche) "serait la femme".

Nietzsche, Le Gai savoir (60).

 

 

L'éperon, c'est la pointe d'un navire qui brise les vagues. En latin, rostrum est un bec ou toute structure anatomique recourbée en forme de bec : pointe de serpette, gueule d'une fontaine, tête de marteau, bec de lampe, pointe d'une île, éperon des navires. C'est aussi une pointe de rocher qui, à l'entrée d'un port, "rompt les lames". Sa fonction peut donc être agressive ou protectrice (à la façon d'un parapluie). Il peut être porteur d'une menace mortelle, ou briser l'attaque. Et Derrida d'ajouter : "L'éperon, en francique ou haut-allemand sporo, en gélique spor, cela se dit en anglais spur. Dans les Mots anglais, Mallarmé le rapproche de spurn, mépriser, repousser, rejeter avec mépris. Ce n'est pas une fascinante homonymie, mais d'une langue à l'autre l'opération d'une nécessité historique et sémantique; le spur anglais, l'éperon, est le "même mot" que le Spur allemand : trace, sillage, indice, marque".

C'est la femme qui porte "une opération éperonnante plus puissante que tout contenu, toute thèse et tout sens" (p86). Laquelle? Celle qui disqualitife le projet herméneutique de la vérité, en questionnant à la fois la femme et l'écriture, par suspension de l'opposition décidable du vrai et du non-vrai.

 


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