Il y a aporie (a-poros en grec, sans chemin, sans issue), lorsque, devant une délimitation, une frontière qui semble tracée, bordée, il y va d'un certain pas qui menace l'indivisibilité de cette frontière. Nous sommes à l'abri, la frontière nous protège, c'est un bouclier qui garde notre intériorité, notre secret, dissimule quelque chose d'inavouable. Cette délimitation nous autorise à projeter une tâche, un projet. Mais il arrive que cette frontière se divise, qu'elle ne soit plus soi-même. (Il en est ainsi devant le franchissement ultime, celui de la mort). Pour cela Derrida retient le mot de problème. Si la frontière était un problème, on pourrait la mettre à l'épreuve par le discours. Mais devant ce passage, cette expérience intraductible, on ne peut même plus constituer un problème. Cette expérience, Derrida la nomme aborder l'autre comme tel. La protection de la frontière disparaît, on ne peut plus trouver ni substitut, ni prothèse. On est désarmé, nu, absolument nu, exposé dans son unicité irréductible. Il n'y a plus d'objet présentable, plus de problème.