Il faut lire cette proposition en tension/conjonction avec cette autre proposition écrite à partir d'un passage du texte de Derrida, Feu la Cendre, pp15-27, quand il commente la phrase Il y a là cendre, une phrase qui est elle-même une citation, de lui-même ou d'un autre : On ne sait rien de la cendre, cette chose qui se destine à une dispersion sans retour, la mémoire perdue de ce qui ne se garde pas, ne reste pas et ne revient à personne. Pour Derrida la phrase Il y a là cendre est indécidable, ambiguë, et même imprononçable (à cause de l'indétermination orale du "là/la"). Ces deux propositions jouent sur cette ambiguité.

Dans la présente proposition, l'accent est mis sur la mémoire, la dette, le devoir à l'égard de la cendre. S'il y a cendre, il y a histoire à raconter, image, métaphore ou métonymie. La cendre est là, le mot sort d'une bouche, elle porte, elle garde. C'est un nom commun (féminin), mais on peut aussi le lire comme un nom propre : Il y a là Cendre. Cendre, avec une majuscule, pourrait un nom de femme, le nom singulier d'une personne disparue, mais ce pourrait être aussi son nom à lui, "le soi-disant signataire". Le nom dirait ce qu'elle (ou il) fait, ce qu'elle (ou il) est, ou ce qu'elle a été, car la cendre est la mémoire d'un feu. Feu Untel, dit-on pour un défunt, Feu Cendre, feu la cendre. S'il y a cendre, c'est qu'il y a eu feu (pas de cendre sans feu), donc sacrifice, donc aussi quelque part résurrection (Phénix). La cendre est le monument de l'incinération, qui implique reconnaissance, dette, devoir, prescription. Il faut rendre grâce à la cendre, l'entourer d'amitié, la donner, la rendre, la célébrer, l'aimer.

Celui qui aura dit ou cité cette phrase (Il y a là cendre), celui-là ne pourra pas nier que c'est une phrase à lui, il la donne et il la reprend. Il feint de ne pas la signer.