Pour St Augustin, la liberté n'est pas une disposition humaine intérieure ni une faculté, comme la volonté : c'est un acte. A chaque naissance, quelque chose de nouveau, d'originel, apparaît. Chaque individu humain est un commencement, qui arrive au monde comme être libre. En créant l'homme, Dieu a introduit la liberté dans le monde de manière irréversible.

Hannah Arendt reprend à son compte cette pensée augustinienne en la sécularisant. La source de toutes les activités humaines est la faculté de commencer. Même si elle reste cachée, même quand elle ne se traduit pas en liberté politique, elle est un don suprême. L'homme est environné de processus et d'automatismes. Il a la capacité de les interrompre. Poussé par des forces historiques, biologiques, naturelles ou cosmiques, il agit. Des événements se produisent. Un événement n'est jamais totalement explicable. Il transcende toute prévision et s'accomplit à la façon d'un miracle. De tels miracles se produisent constamment dans l'histoire, grâce à la capacité humaine de produire de l'"initium". L'histoire est pleine d'événements.

Constater que l'homme est un être agissant n'est pas de la superstitution; c'est au contraire une attitude réaliste. Seul le désastre est inéluctable.