D'un côté, dit Derrida, Vivre ne s'apprend pas. Mais d'un autre côté, nous sommes nécessairement des héritiers. Ce constat paradoxal, il l'a concentré dans un syntagme, une locution : "Je voudrais apprendre à vivre enfin". Il y a urgence car là où je suis, entre vie et mort, je ne peux pas échapper à ces autres qui ne sont pas présents, qui n'ont ni substance ni existence, et dont les questions viennent vers moi.

Mémoire, héritage, générations, tout cela implique une politique. Au nom de la justice, des générations de fantômes ni tout à fait morts, ni présentement vivants, furtifs et intempestifs, affirment un axiome : le devoir de justice engage au-delà du présent. Toute question éthique se pose devant ces autres. Ils imposent, comme le père d'Hamlet devant son fils, un principe de responsabilité et de respect pour tous ceux qui, déjà morts ou pas encore nés, exigent la justice.

Quel rapport avec Marx? Il est l'un de ces spectres, qui exige que nous lui soyons fidèles. Il faut compter avec lui, comme avec les autres. Nous ne sommes pas obligés d'en hériter, mais nous ne pouvons pas échapper à la nécessité du choix.