L'Internet est vécu comme un lieu de liberté individuelle, comme l'ont affirmé dès 1994 les rédacteurs de la Grande Charte. Il faut que la personne y soit libre de communiquer, de partager, de produire et de diffuser ses créations, de répliquer, transformer, subvertir, etc... Mais l'Internet est aussi un moyen de créer des richesses, ce qui implique une protection de la propriété et de l'économie marchande par la régulation, la loi, voire la coercition. La sécurisation entre en contradiction avec la jouissance de la liberté.

L'auteur qui diffuse ses oeuvres sur Internet veut exposer ses talents, mais il prend aussi le risque qu'on lui subtilise son identité. Pour se protéger du désir qu'il suscite, il fait appel au pouvoir civil et politique. L'internaute qui désire se réaliser "librement", sans autre contrainte que le sens qu'il donne à ses oeuvres, peut se laisser manipuler pour toutes sortes de dispositifs informatiques et logiciels destinés à le contrôler. La liberté est ébranlée, sinon niée, au coeur même de son affirmation.

Il en résulte deux visions de l'Internet : une vision humaniste et une vision pragmatique fondée sur l'intérêt économique. Les deux visions coexistent et appellent un espace public à la fois libéral et autoritaire. Elles sont entrelacées et peuvent conduire à des demandes de régulation différentes.