Aboulafia déclare avoir étudié Aristote en profondeur. Sa sagesse extérieure n'atteint pas, selon lui, celle du Sefer Yetsirah, qui est à la fois intérieure et supérieure (p144), ni celle à laquelle on peut accéder par la permutation des lettres, une technique d'extase qui ne passe pas par l'exégèse. Selon la Cabale théosophique, il est possible de générer des significations par vocalisation des lettres, à partir de manipulations des textes canoniques. Alors que la philosophie aristotélicienne se fonde sur des phrases cohérentes, la méthode herméneutique d'Aboulafia repose sur une logique littérale.

Aboulafia cite l'adage "Préserve tes fils de la logique" (higayon) (Berakhot28b). Il rejette la logique grecque. Il faut la réserver aux âges mûrs, quand on peut la combiner avec la Cabale. Jacques Derrida fonctionne de la même façon, mais de manière sécularisée.

Le mystère ne résulte pas de l'approfondissement du texte, mais du démantèlement de l'ordre normal des mots et des lettres. Le sens caché émerge de la déconstruction de la structure verbale. Les deux sens coexistent et ne sont pas contradictoires.

La racine str (soter, secret), qui fascinait Aboulafia, désigne aussi la déconstruction, la contradiction et l'occultation (histir, il dissimule). [Jacques Derrida, lui aussi, parle d'extase à propos du poétique ou de l'art.]