Ce pourrait être un fantasme de fils : “Je sauve mon père pour qu'il me reconnaisse”. Indiana Jones porte le même nom que son père. Il s'appelle Henry Jones, et son père l'appelle Junior, ce qu'il déteste. Il préfère qu'on le désigne par le nom de son chien : Indiana. Pourquoi le nom de son chien? Peut-être parce que le chien, lui, le reconnaît.

Mais l'important, dans cette histoire, est peut-être autre chose. Par exemple que la mère est morte. S'il n'y a pas de médiation entre le père et le fils, s'ils se ressemblent tant (jusqu'à répondre et raisonner simultanément), c'est sans doute pour cela : la mère, la médiatrice, est morte.

Bon. Tout ça ne va pas très loin et ne suffit pas à expliquer le succès phénoménal du film. Il y a aussi ça : Indiana est un casse-cou qui s'en tire toujours. Ce qu'il fait, il ne le fait pas pour lui mais pour d'autres : pour des musées par exemple. Jamais pour l'argent. Il voyage ailleurs, et cet ailleurs est son identité à lui, sa véritable identité, sous ses dehors de professeur et d'expert. Le Graal ne l'intéresse pas pour le Graal, mais pour la recherche, pour le père qu'il rencontre et sauve à travers la Coupe (le père et la Coupe, il les rencontre mais ne les trouve pas).

A sa façon excessive, Indiana est un yupie. C'est le contraire d'un loser. Il réussit toujours ce qu'il entreprend. Il n'accumule pas le savoir pour lui-même. Son savoir accumulé dans ses grimoires ne lui sert à rien d'autre qu'à ses exploits. C'est un moyen pour faire des bons films.