En principe, l'Internet est assujetti aux lois et aux normes en vigueur. Mais il y a beaucoup de raisons pour que cet assujettissement ne soit que relatif :

- les sources de régulation sont souvent contradictoires. Elles sont si nombreuses qu'elles se neutralisent et peuvent conduire à une saturation, c'est-à-dire à un excès de règlement,

- c'est un système transnational qui offre beaucoup de possibilités d'échapper aux législations nationales,

- sa technicité et sa rapidité d'évolution rendent toute législation et tout système de contrôle rapidement inopérants,

- il est lui-même un ensemble de systèmes normatifs relativement autonomes et une source de normes indépendamment des Etats et mêmes des organismes multilatéraux. Ces normes ne sont pas toujours explicites. Elles peuvent prendre la forme de codes ou de langages, ou être intégrées dans les calculs, quelle que soit la forme virtuelle que prennent les résultats de ces calculs.

- il est l'addition de tous ses utilisateurs, dont les comportements sont difficilement prévisibles, et qui ne sont pas organisés de manière hiérarchique.

Chaque dysfonctionnement de l'Internet - et ils sont nombreux, tend à provoquer l'émergence de nouvelles normes, qui risquent de faire naître de nouveaux dysfonctionnements.

Dans ces conditions, la question de savoir quel genre de légalité fonctionne sur Internet n'est pas facile. Dans une certaine mesure, il produit sa propre légalité. Une formule célèbre de Lawrence Lessing dit : sur l'Internet, le code, c'est la loi. La production légale dépend d'Internet lui-même, mais aussi de pratiques qui sont celles du monde où il fonctionne, lesquelles sont elles-mêmes régulées par ailleurs. On aboutit à un système complexe dans lequel on ne peut viser qu'un optimum.

L'Internet est soupçonné de produire non seulement son propre code, ses propres normes et sa propre loi, mais aussi sa propre gouvernance. Des institutions plus ou moins formelles sont appelées à trancher entre normes concurrentes, en dissimulant parfois les enjeux éthiques et politiques qui se trouvent derrière.

Peut-être l'Internet est-il l'ONU de demain, la véritable source future de droit international.