Ce mot, raison, semble raisonnable. Pourtant Goya savait déjà, dès 1797 (Kant était encore vivant), que Le rêve de la raison engendre des monstres. L'avenir allait lui donner raison, c'est le cas de le dire.
Qui commande la raison? Si elle se commande elle-même, spontanément, comme faculté de l'âme, à partir d'enchaînements logiques, universels, elle est indépendante des faits et des actions. Si c'est un savoir empirique ou analytique, elle dépend de l'expérience. Il y a là deux voies, deux directions incompatibles, une des antinomies parmi celles que Kant a découvertes.
Notre époque se méfie de la raison. Elle la considère comme une production historique du 18ème siècle (les Lumières), dont la source est la même que la religion. Elle attache plus de prix à l'efficacité et la performance qu'à la démonstration et au raisonnement. C'est le postulat d'un monde intelligible qui s'effondre. Oubliant l'humanisme, on prend le psychisme pour une chose. L'idée que la raison puisse aider à découvrir le bon, le bien ou l'art est plus obsolète que jamais.
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