L'impression que le sens se dérobe est générale. C'est devenu une banalité : il n'y a plus de repères, plus d'autorité, plus d'enseignement, plus de politesse, plus de valeurs, etc.... Nombreuses sont les bonnes âmes qui répètent : Il faut redonner du sens [à la vie, au travail, à la connaissance, etc...]. Certains accusent l'Internet d'avoir causé ce déréglement, d'autres pointent le dépérissement de la famille, ou l'incompétence des hommes politiques. Mais si l'on considère le domaine de l'art, le problème ne date pas d'hier. La photographie qui y tient une place éminente (si ce n'est dominante) n'est-elle pas contingente par essence? Celui qui appuie sur le déclencheur fait-il autre chose que d'enregistrer mécaniquement des zones de lumière? Rien de plus machinique, de plus intrinsèquement dépourvu de sens, que l'acte même de prendre une photo. D'ailleurs les peintres l'avaient compris avant même l'apparition du dagguéréotype. Goya joue systématiquement sur le non-sens, l'horreur, l'ininterprétable et le censuré; Cézanne valorisait l'objet insignifiant; et aujourd'hui le cinéma ne propose plus que des simulacres de scénarios. Partout dans notre environnement, les voix résonnent dans le vide. Mais justement, dans ce contexte où la peinture devient inénarrable, elle donne encore plus à penser qu'à la bonne vieille époque de la rhétorique. Si Anselm Kiefer, artiste allemand, a fait se rencontrer la Cabale et la déréliction moderne, ce n'est pas par hasard.

Il se peut qu'une pensée qui ne veut rien dire ne soit pas si désespérante. Et si c'était elle qui, par son ouverture, qui ouvrait de nouvelles langues, de nouvelles possibilités?

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Propositions

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