L'homme est un animal prothétique. Il fabrique de l'artefact comme il respire. S'il est une caractéristique qui lui soit propre, et à lui seul, c'est la supplémentarité. Il en est ainsi depuis le départ. Depuis qu'il a inventé le langage, il est l'être qui ajoute. Le signe, l'écriture, le jeu, l'image, le dessin, l'art, l'Internet sont des suppléments, et même la vie n'a pas pour lui d'autre sens. Tout chez l'homme vient en plus, de surcroît, y compris le commencement.
Par rapport au corps biologique, la voix vient en plus. Toute voix est dans une position de supplément. Qu'on l'attende ou qu'on l'appelle, elle déborde sa place. Elle incite au dépassement sans réussir à surplomber. C'est sa tragédie et aussi sa chance. Comme le dit Merleau-Ponty de la dialectique, il ne faut s'en servir que comme supplément d'être.
L'espace de dissémination est une passion du supplément. A la suite de Van Gogh, l'avant-garde s'y est jetée compulsivement et les marchés avec avidité. De la pomme de Cézanne à l'objet (i) de Schwitters, c'est la logique de l'excès qui prévaut sur toute autre.
Ainsi se réalise une fois de plus la prescription biblique : Tu aimeras dieu de tout ton surplus.
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