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Christian Metz                     Christian Metz
Sources (*) : CinéAnalyse : En laissant se faire le retrait               CinéAnalyse : En laissant se faire le retrait  
Christian Metz - "Le signifiant imaginaire - Psychanalyse et cinéma", Ed : Union Générale d'Editions, Coll 10/18, 1977,

Le signifiant imaginaire - Psychanalyse et cinéma (Christian Metz, 1977) [SI]

   
   
   
                 
                       

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Table

PLAN

I. Le signifiant imaginaire. (p7).

1. L'imaginaire et le "bon objet" dans le cinéma et dans la théorie.

2. L'imaginaire du chercheur.

3. Identification, miroir.

4. La passion de percevoir.

5. Désaveu, fétiche.

Conclusion : "Théorise", dit-il...

 

II. Histoire/Discours (note sur deux voyeurismes). (p111).

 

III. Le film de fiction et son spectateur (Etude métapsychologique). (p121).

1. Film/rêve : le savoir du sujet. (p123).

2. Film/rêve : la perception et l'hallucination. (p133).

3. Film/rêve : degrés de secondarisation. (p148).

4. Film/fantasme. (p159).

5. La visée filmique. (p170).

 

IV. Métaphore/Métonymie, ou le référent imaginaire. (p177).

1. Figure primaire, figure secondaire.

2. Figures fines, figures larges.

3. Rhétorique et linguistique : le geste jakobsonien.

4. Référentiel, discursif.

5. Métaphore/métonymie : dissymétrie d'une symétrie.

6. Figural et substitutif.

7. Le problème du mot.

8. La force et le sens.

9. Condensation.

10. Du travail du rêve au processus primaire.

11. La censure : bannière ou écart?

12. Déplacement.

13. Entrecroisements et tissages dans le film.

14. Condensations et déplacements du signifiant.

15. Paradigme/syntagme dans le texte de la cure.

 

Je m'installe dans une salle de cinéma. Les lumières s'éteignent. J'arrête toute conversation et toute relation avec mon voisin. Je ne bouge plus. Ma situation peut être comparée à celle d'une personne endormie. Bien sûr je reste conscient. Je ne perds pas la perception de l'espace comme dans le rêve. Mais j'oublie mes soucis habituels. Je renonce à ce qu'on pourrait appeler ma personnalité diurne. Je me transforme en surface d'enregistrement. Mes protections habituelles, le contrôle que j'exerce sur moi-même, mes censures sont diminuées. Je fais confiance à aux images qui apparaissent sur l'écran avec leurs mouvements d'appareil, leur cadrage et tous les artefacts qui constituent le cinéma. Réduit à un pur regard dans une sorte de rêverie éveillée, je me laisse happer par la fiction. Je suis prêt à m'identifier à n'importe quel personnage qui apparaîtra sur l'écran, même s'il n'a pas le même sexe que moi, même s'il n'a pas la même condition sociale ni la même couleur de peau. Je peux aussi m'identifier à une caméra dans ses mouvements complexes, voire à plusieurs caméras. Je suis même capable de m'identifier à des regards invisibles : celui du réalisateur, dont la présence est implicité mais oubliée, ou d'un narrateur qui n'apparaîtrait par sur l'écran, par exemple si sa voix est "off" ou si son corps se trouve, comme on dit, "hors-champ".

J'accepte donc une modification radicale de ma personnalité, encore plus radicale que dans un rêve. Je ne suis plus moi-même, mais plusieurs autres. J'ai renoncé à mon propre inconscient. J'entretiens avec le film une relation étrange. C'est un objet pour moi, mais un objet à l'intérieur duquel je suis. J'ai renoncé à mes propres fantasmes pour ceux d'autrui, qui peuvent éventuellement flatter ou décevoir les miens. Le plaisir que j'en retire est tout à fait différent de mes plaisirs habituels. Ce qui m'aurait dégoûté peut me faire jouir, et ce que j'aurais valorisé dans la vie courante me paraît sans intérêt. Ce que j'expérimente est tout à fait spécial : je me trouve à l'intérieur du fantasme d'un autre. Vis-à-vis de l'histoire racontée, ma position est ambivalente : j'y crois et je n'y crois pas. J'y crois car j'ai désactivé les critères de réalité usuels. L'écran est devenu un miroir où je peux projeter mes identifications. Mais je n'y crois pas, je sais que la scène filmée a été fabriquée, elle a maintenant disparu et ce qu'il en reste n'est qu'un voile fragile, une projection sur écran.

 

 

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Formulations à partir de ce texte (les têtes de chapitre sont entre crochets) :

 

[Le cinéma règle le rapport au désir]

[Le cinéspectateur entretient avec chaque film une relation d'objet dont il n'a pas la maîtrise]

[Dans le film de fiction, le signifiant cinématographique s'emploie tout entier à effacer ses propres traces]

[L'"impression de réalité" telle que suscitée par le cinéma infléchit le régime de la représentation dans le sens d'une perception plus active du désir inconscient]

[Le cinéma est le seul art qui soit d'emblée une industrie]

[Le cinéma est une instance initiatrice pour une adolescence permanente]

Au cinéma, le voyeur ne peut pas s'appuyer sur la complaisance de l'objet vu, qui est absent

Le cinéma est un lieu de passage, de transformation et de confrontation des codes

On adhère à un film

Le cinéma repose sur une série de clivages de la croyance

Le cinéma préserve et entretient le désir

Comme tous les "grands arts", le cinéma maintient l'objet à distance

Le cinéma est une technique de l'imaginaire

Un noyau narratif (diégèse) est présent dans presque tous les films

La figure est une poussée primaire du discours qui génère sa propre défiguration

Le cinéma met en jeu les pulsions scopique et invocante : désirs de voir et d'entendre qui entretiennent le manque et la poursuite infinie de l'imaginaire

Le but de l'institution cinématographique est d'établir entre le spectateur et le film une relation de "bon objet"

L'écran du cinéma n'est pas une scène, c'est un lieu absent

L'écran du cinéma est un miroir où le spectateur peut trouver d'autres identifications que son propre corps

Au cinéma, la "voix-off" est le rempart de l'incroyance qui conforte la croyance

Un film irrigue les figures fantasmatiques du sujet

Le film clot le discours sur un texte

Certaines figurations filmiques désagrègent les unités du code

Le cinéma ne représente pas l'imaginaire, il est l'imaginaire, car il combine en lui la présence et l'absence

Le signifiant cinématographique se prête particulièrement à la fiction car il est lui-même une illusion fictive et absente

L'état filmique est un repli narcissique où le sujet suspend ses investissements d'objets

Le cinéma met en rapport avec l'objet, sans l'illusion d'une plénitude possible du rapport objectal

Le spectateur de cinéma est tout-percevant, au sens de la toute-puissance du moi

Engageant l'audition, la vision, le temps et le mouvement, le cinéma mobilise plusieurs axes de perception, mais cette perception porte sur des objets absents

Je ne peux croire au film de fiction que parce qu'il semble réel ou présent, mais ne l'est pas (fétichisme)

Le cinéma est un réglage du désir pervers

Les conceptions du cinéma fondées sur la phénoménologie rendent compte du sentiment qu'éprouve le moi perceptif du spectateur

Le cinéma de fiction est un accomplissement hallucinatoire de désir qui flatte ou déçoit le fantasme (conscient ou inconscient)

Le spectateur de cinéma se sait au cinéma tandis que le rêveur ignore qu'il rêve; pourtant l'impression de réalité du cinéma est comparable à l'illusion de réalité du rêve

La perception filmique est réelle

La fiction cinématographique est une instance semi-onirique

Le cinéma est une rêverie éveillée

L'identification cinématographique primaire est l'identification du spectateur à son propre regard

L'institution cinématographique prend en charge les mécanismes de sa propre reproduction

Le cinéma imite (sémiologiquement) le roman, il le prolonge (historiquement) et le remplace (sociologiquement)

Le théatre a vu le jour comme une cérémonie dans la cité, tandis que le cinéma est né dans une société éclatée, individualiste, où prévalait la famille restreinte

Un film est une élaboration secondaire qui rend intelligibles des fantasmes et des contenus inconscients

Le paradoxe du cinéma est qu'il est signifiant, et aussi incarnation de l'imaginaire

L'oeuvre d'un art nous dérobe cet art en même temps qu'elle nous le présente, parce qu'elle est à la fois moins et plus que lui

La force de présence d'un film tient à sa capacité à faire jouir, par ses appareillages et son théatre d'ombres, d'un objet absent

Au cinéma, le cadrage et les mouvements d'appareils fonctionnent comme censure

Un code cinématographique est un système que présuppose la compréhension d'un film

La rencontre entre le code cinématographique et les autres codes en vigueur règle l'identification du spectateur

Le fétiche arrête le regard devant l'objet de la castration

Le spectateur s'identifie au personnage du film

Le scénario est une instance ambiguë entre le signifiant et le signifié, entre le manifeste et le latent

Quand le spectateur de cinéma s'identifie à la caméra, il se situe à la place du foyer de toute vision

Le spectateur de cinéma s'identifie à lui-même comme pur acte de perception ou pur regard

Le propre du spectateur est d'être hors-champ; et tout hors-champ rapproche du spectateur

Dans les films sans scénario, le signifiant cinématographique inscrit son propre jeu en prenant en charge la signification d'ensemble du film

Le spectateur de cinéma hallucine paradoxalement ce qui est vraiment là : les images et les sons du film

Le cinéma suppose un double retrait : 1/ L'objet filmé 2/ la personne du spectateur

Immobile et muet, le spectateur de cinéma est en situation de "petit sommeil"

Ce qui est troublant dans le fantasme, c'est qu'il est à la fois proche des sources pulsionnelles et organisé en une histoire

Tout film est un film de fiction, et le cinéma en général est happé par la fiction

Le cinéma est fétichiste : sa machinerie fait oublier l'absence de l'objet devant lequel le spectateur s'émerveille

Le cinéma est l'affaire de l'homme privé : pur sujet vidé de tout contenu, omnivoyant et invisible, point de fuite de la perspective monoculaire

Le cinéma vide la place du sujet et efface les marques d'énonciation

Un film met en relation avec le fantasme d'autrui

L'état filmique et l'état onirique se rejoignent dans leurs trouées

Le cinéma est une répétition de la scène primitive

Le signifiant imaginaire - Psychanalyse et cinéma (Christian Metz, 1977) [SI]

 


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