Derrida
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TABLE des MATIERES :

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Index des termes

de l'oeuvre

de Jacques Derrida

Un seul mot - ou un syntagme.

         
   
Derrida, l'image                     Derrida, l'image
Sources (*) : La pensée derridienne : ce qui s'en restitue               La pensée derridienne : ce qui s'en restitue
Pierre Delain - "Les mots de Jacques Derrida", Ed : Guilgal, 2004-2017, Page créée le 27 septembre 2006 Peinture, fiabilité, vérité, alliance

[Derrida, l'image]

Peinture, fiabilité, vérité, alliance Autres renvois :
   

Sur l'image

   

Derrida, le dessin

   

Derrida, la vue, la vision

Orlolivre : comment ne pas se plonger dans le (méta)cinéma Orlolivre : comment ne pas se plonger dans le (méta)cinéma
                 
                       

1. Le présent de l'image.

Dans le monde occidental, on se méfie de l'image. Elle peut être fabriquée artificiellement, reproduite, imitée, déformée, synthétisée. Elle semble moins crédible qu'une parole vivante, un témoignage "vécu". Pourtant, la tradition la voit aussi comme une énigme, un mystère interprétable, ou encore la trace d'un monde passé ou irreprésentable. On sait que le passé ne reviendra jamais, mais on accorde quand même un certain crédit à l'image. Paradoxalement, sa valeur vient de la disparition de son référent. Elle marque l'échec de cette disparition, elle conjure son effacement complet. Au fond d'un abri très sombre, un souvenir sans conscience ni présence est conservé. L'image en appelle à la mémoire, sans supprimer la morsure du temps. Son commencement, c'est la ruine de ce qu'on tente d'y saisir, le deuil de ce qu'on suppose en réserve, en attente. Derrière elle, le spectre insiste, il demande réparation, il pleure, il veut revenir, il nous hante. Même silencieuse, enfermée dans le tombeau du signe ou de la représentation, l'image est habitée par des mots invisibles. En favorisant leur réapparition, elle résonne des possibilités de la voix.

 

2. Une image qui chasse la présence.

Quand l'image se présente, elle ne représente qu'elle-même, sans garantie de vérité. Sa valeur iconique tient d'abord à ce qui se montre en elle, indépendamment de ce qu'on peut savoir ou imaginer du contexte où elle a été créée, de ce qu'elle signifie, etc. Dans certaines oeuvres, ce mode opératoire qui chasse la présence est privilégié. C'est le cas par exemple de Droit de regards de Marie-Françoise Plissart, une oeuvre photographique dans laquelle aucun récit, aucune histoire n'est donnée. Dans ce cas comme dans d'autres, l'image qui arrive semble inanalysable. Il revient au regardeur de trouver un biais pour l'analyse, la critique. Il peut découper l'image, discerner les collages et montages dont elle est faite. Il peut les dissocier, les associer, faire apparaître des séries. Il peut s'intéresser à la façon dont elles sont collées, à leur structure kaléidoscopique, à l'autre scène qui vient en plus de l'image, par-dessus le marché, à l'envers. Mais sa responsabilité est de ne pas plaquer une rhétorique sur l'image. Sa tâche est de tout faire pour sauver l'unique en elle, le singulier, l'intraduisible. Chaque image renvoie différemment à l'autre, c'est un "coup".

La "loi de l'image" tend à faire violence à la parole. Cette loi, qui énonce que l'iconique a autorité sur le verbal (Trace et archive, image et art p103) s'appuie sur la faculté qu'a l'image de soutenir une croyance. Mais rien n'assure cette croyance, aucune consistance ne peut lui donner un crédit absolu. Comme l'indique le mot grec fantasma, qui désigne à la fois l'image et le revenant, il y a toujours en elle des possibilités d'espacement ou de différenciation (de différance). L'oeuvrant ne peut faire oeuvre que s'il parvient à préserver l'espacement, à garder à l'image sa réserve discursive. Il faut pour cela que le mot fonctionne comme une image. C'est ce que Derrida soutient à propos de son propre rôle dans le film de Safaa Fathy, D'ailleurs Derrida :

"Quand on ne comprend pas tout d'un langage, ce qui arrive tout le temps, même quand on est très intelligent et très cultivé, on ne comprend jamais tout, ça veut dire que le mot fonctionne comme une image. Il garde sa réserve discursive, sa réserve de pensée, sa réserve théorique, philosophique, tout ce que vous voudrez, mais il est d'abord là comme une image et c'est ça qui fait oeuvre" (Trace et archive, image et art, p114).

Soutenir que, pour faire oeuvre, c'est le mot qui doit se faire image - et non pas l'inverse - c'est reconnaître à l'image une faculté singulière de mise en mouvement. C'est admettre que la "loi de l'image" énoncée ci-dessus ne dit pas le tout de l'icone.

 

3. L'image aujourd'hui.

Aujourd'hui, l'expérience de l'image déborde celle de l'écriture alphabétique. La télévision, la vidéo, le cinéma, la radiographie ou d'autres pratiques pictographiques / idéographiques concurrencent l'écriture phonétique, renversent son privilège. Il y a de l'image partout, même dans les livres. Le texte se fait image, et l'image se fait texte.

Plus il s'appuie sur les télétechnologies, plus le présent vivant donne l'illusion de survivre. Avec la diffusion "en direct" ou en "temps réel", on croirait qu'il réapparait miraculeusement, avec une force anamnésique bien plus rapide et convaincante que celle de la parole. C'est ce qui arrive dans les médias. En disant Je suis un spectre, l'image produit des effets de reproduction, de virtualisation, de rhétorique, qui sont aussi des enjeux politiques. Le "faire savoir", à même l'image, produit et accrédite un sens. Quand nous introjectons ces images (à la façon du deuil), cette logique spectrale envahit tout.

 

 

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Propositions

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L'image n'a de valeur iconique - ou filmique - que là où elle se passe de ce qu'elle est censée représenter, de son référent

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La représentation est comme une pyramide : sépulture commémorant des images mises en réserve dans un puits silencieux

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Au commencement de l'oeuvre, comme de tout autoportrait, il y a la ruine

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Ce qui fait oeuvre dans un film, c'est là où le mot fonctionne comme une image, là où il garde sa réserve de pensée discursive, théorique, philosophique

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Toute image porte la ruine originaire

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L'expérience proprement cinématographique résiste à la loi filmique : ne réduisant pas l'image à l'autorité du discours, elle y laisse entendre les mots invisibles qui l'habitent

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La peinture expose l'autre scène qui vient en plus, par-dessus le marché, à l'envers du texte et de l'image

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L'image a une force de spectralité anamnésique qui excède infiniment ce que pourrait dire une parole, un discours - ou même un métalangage

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La logique spectrale envahit tout, partout où se croisent le travail du deuil et la tekhnè de l'image

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Les télétechnologies divisent le présent-vivant, qui ne survit qu'en tant qu'image ou archive spectralisée

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Au cinéma, l'image porte une croyance qui doit être incontestable, mais que rien n'assure; sans l'image, dans la musique, la croyance disparaît

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Dès qu'il y a technologie de l'image, la visibilité porte la nuit (notre propre mort) et la croyance en une réapparition miraculeuse

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Comme la fable, l'information médiatique "fait savoir", elle produit un effet de savoir "à même" l'image ou l'oeuvre, elle accrédite un sens par une rhétorique

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Au cinéma, l'essence de l'image rejoint celle de la parole : une quasi-présentation d'un "lui-même là" du monde dont le passé est irreprésentable

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Dans un film structuré selon la nécessité et la loi de l'image, l'iconique a autorité sur le verbal

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En photographie comme pour toute image, l'adhérence du référent ne se rapporte pas à un présent ni à un réel, mais à l'autre, chaque fois différemment

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Dans une oeuvre photographique, à la différence de ce qui se passe dans toute autre image, l'histoire ne précède pas le récit

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"Tout faire pour sauver, dans la langue et dans l'image, la singularité de l'idiome intraduisible" - tel est le souci principal, la responsabilité à prendre

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La mise en oeuvre de l'image fait de l'archivation une interprétation active, productive, reproductive, en tant que récit faisant savoir

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Avec la télévision ou le cinéma, une image survit en disant "Je suis un spectre"; elle produit des effets de reproduction, de virtualisation, qui sont des enjeux politiques

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L'art du cinéaste, c'est de soumettre, sans violence, la parole à l'image, tout en donnant à entendre cette parole

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Il faut apprendre à analyser ce qui nous arrive par l'image en découpant les images et en discernant les collages et montages dont elle est faite

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L'écriture alphabétique est finie, terminée, débordée par l'expérience actuelle de l'image

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Le Joyce de "Finnegans Wake" est intraduisible; mais il appelle la traduction, comme l'interdit de l'image appelle l'image

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