Quand les mythologies collectives s'effacent, grande est la tentation de se replier sur les micro-histoires. Qu'est-ce que l'intime? C'est une notion fragile, précaire, volatile (p35), chargée d'affect, nimbée d'imagination. On le circonscrit à travers les métaphores du retrait, du retranchement, du secret. Il oppose au "public" une esthétique de la distance, une éthique du recueillement. Mais alors comment peut-il se figurer, s'exposer?

Cet art s'est imposé dans les années 1990, comme journal intime, autobiographie, autofiction, performances corporelles. On ne s'oppose plus au système, on l'infiltre. On se met à l'écoute de son moi dans l'espoir de renaître à soi. Véracité et authenticité sont les nouvelles mythologies (p39), les nouvelles chimères idéologiques. Préserver son corps propre du contact de l'autre, de la rencontre, du risque de la contamination, mais sans souci transgressif. On ne résiste plus, on se replie, à l'écart du politique, sur le sommeil ou la jouissance. L'art est désublimé.