Tout le monde ne peut pas parler à un spectre. Il faut se trouver dans un lieu de parole, avoir avec lui un lien de filiation. Mais si ce lien s'instaure, comme c'est le cas pour Hamlet avec son père (le roi), alors on peut l'appeler, l'interpeller, s'entretenir avec lui, plus efficacement que quand il était vivant. On peut même lui commander, lui donner des ordres, le conjurer de parler - dans le souci de l'arrêter, de stabiliser sa parole.

Entre vie et mort, un spectre aurait-il plus d'effectivité qu'un homme vivant? La voix d'un mort serait-elle aussi -voire plus - puissante que la présence vivante de la voix?

Si l'on suit Jacques Derrida, ce pourrait être le cas de Marx. Après tout, c'est lui qui appelait à sa propre transformation à venir. Lui répondre, s'engager dans une lecture, c'est reconnaître sa puissance et son génie (au-delà de toute pétrification dans les dogmes marxistes).