- Bibliographie de Maurice Merleau-Ponty.
Maurice Merleau-Ponty fait partie de ces auteurs disparus "prématurément", comme on dit, qui (comme André Bazin pour le cinéma, à peu près à la même époque) ont laissé la trace durable d'une pensée, d'un chemin à parcourir, comme si leur passage n'avait pas eu d'autre but que de marquer leur champ. La marque est indélébile, et tous ceux qui s'intéressent à la vision, à la perception, au regard, au corps et à la chair en passent par Merleau-Ponty.
Mais qu'est-ce que la chair? Celle qu'on regarde, celle qu'on entend, celle qu'on touche? A moins que ce ne soit celle qui nous regarde, celle qui nous entend ou celle qui nous touche? Ou bien la chair en général, la chair universelle? Un peu de tout ça, mon général. Être, dit-il, c'est s'entendre parler doublement, de l'intérieur et de l'extérieur - et voici introduite dès la départ la dimension chiasmatique de la pensée de Merleau-Ponty. Si vous me demandez ce qu'est un chiasme, eh bien c'est ce que, justement, j'allais vous expliquer, car le corps a deux côtés, senti et sentant, et c'est par ces deux côtés qu'il nous unit aux choses - dont d'ailleurs il faut partie. Voilà qui n'est pas nécessairement simple à expliquer, mais commençons par le commencement. Il y a être, il y a monde, il y a chose, et il y a notre corps. La façon dont tout ça interagit, c'est la chair. Elle s'enroule sur elle-même, ici et maintentant, et par elle, universellement, j'adhère au monde. C'est ce monde sensible qui nous vient en premier. C'est lui l'assise, le fondement de la vérité et de la foi perceptive. C'est à lui que je m'adresse quand je demande : "Que sais-je?"? C'est à lui que s'adresse directement ma vision, avant même de penser. L'être ne répond pas, il reste silencieux, mais si je m'y ouvre, alors peut venir le langage, et l'art aussi, et la peinture, qui célèbre l'énigme de la visibilité.
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