Pour Derrida, la religion a deux sources, mais un seul axiome. Un axiome affirme une valeur, un prix. Il faut qu'on croie en cette valeur (acte de foi), et qu'elle reste intacte - ces deux éléments (fiduciarité et indemnité) étant précisément les deux sources de la religion. Entre la possibilité même d'une axiomatique et celle d'une religion, il y a donc, pour Derrida, un rapport. En admettant que l'axiome se dédouble en deux axiomes distincts, chacun d'entre eux rend possible une religion, c'est-à-dire un système de dogmes institué, déterminé par une histoire, qui se référera à cet axiome comme croyance originaire. Le paradoxe et la complexité de la religion, c'est qu'au nom de cet axiome, pour le préserver de toute atteinte, il sera toujours possible de critiquer telle ou telle autorité, telle ou telle pratique de la religion. La religion justifie à la fois la sacralité de ses formes déterminées et leur critique; on pourra toujours défendre ces formes au nom même de l'axiome qui les condamne.

Un axiome, ainsi défini, est donc pris dans la même logique d'auto-immunité qui s'applique à la raison, à la science, au savoir, à la pensée en général. Toutes ont les mêmes sources et les mêmes ressources.

Le double axiome de la religion est-il, dans ces conditions, universel? Peut-être, mais ce n'est pas sûr. La religion que nous connaissons en Occident est lié à une certaine tradition romaine, latine. Il pourrait y avoir d'autres axiomes ailleurs.

La Vierge est ici prise à l'instant où elle acquiesce aux paroles de l'Ange. Oui, dit-elle en son corps, dans le temps de l'Annonciation, qui est aussi celui de l'Incarnation.