Derrida
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TABLE des MATIERES :

                            NIVEAUX DE SENS :

 
   
Rosalind Krauss                     Rosalind Krauss
Sources (*) :                
Rosalind Krauss - "Le photographique, Pour une théorie des écarts", Ed : Macula, 1990,

Le Photographique, Pour une théorie des écarts (Rosalind Krauss, 1990) [LePh]

   
   
   
                 
                       

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sur le livre

 

Table

p5 : Préface, par Hubert Damisch

p12 : Introduction

 

p17 : I. Existe-t-il un objet de pensée que désignerait l'expression "histoire de la photographie"?

p18 : Sur les traces de Nadar

p37 : Les espaces discursifs de la photographie

 

p57 : II. La photographie et l'histoire de l'art.

p58 : L'impressionnisme : le narcissisme de la lumière

p71 : Marcel Duchamp ou le champ imaginaire

p89 : La photographie comme texte : le cas Namuth/Pollock

p100 : Photographie et surréalisme

 

p125 : III. La photographie et la forme.

p126 : Stieglitz : équivalents.

p138 : Les noctambules.

p154 : A propos des Nus d'Irving Penn : la photographie en tant que collage

 

p163 : IV. En regard de la photographie.

p164 : Corpus delicti

p197 : Quand les mots font défaut

p208 : Note sur la photographie et le simulacre

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Dans sa préface, Hubert Damisch situe ce livre dans le prolongement de deux autres classiques de la photographie : La Chambre claire de Roland Barthes (1980), et la Petite histoire de la photographie de Walter Benjamin (1931). Le Photographique prolonge ces deux grands devanciers en élargissant le propos. Il ne s'agit pas seulement d'analyser la photographie ou les effets de la photographie, il s'agit de définir un objet théorique, un paradigme qui affecte tout notre rapport contemporain à l'image. Ce paradigme est double, écartelé entre ce qui se dit au début du livre et ce qui se dit à la fin. D'une part, la photographie est une trace du réel, un indice. Mais d'autre part, c'est une copie de copie, une fausse copie, un simulacre. Comment articuler ces deux dimensions?

Une photographie n'est pas un signe iconique (une représentation); c'est un autre genre de signe, un signe indiciel produit par un appareil (une machine, un automatisme). Ce qui fait irruption avec elle (et qui n'a pas complètement épuisé son caractère d'événement) est le fait que la lumière puisse s'écrire directement, qu'elle puisse laisser une trace, une archive, de manière quasi automatique, par l'intervention d'une sorte de main prothétique, indépendamment de l'intervention d'un sujet. Cette dimension d'automatisme qui relativise des notions classiques comme "artiste", "auteur", "oeuvre", "style" lui donne une crédibilité particulière. Ce qui apparaît à la vue semble être une émanation directe, presque magique, du réel.

Mais la photographie n'est jamais purement indicielle. Si elle n'était qu'une inscription directe du réel, elle resterait vide de sens. Elle ne devient intelligible que parce que, en plus, elle est en rapport avec des discours. Du daguerréotype, au calotype ou aux vues stéréoscopiques, elle s'est toujours dissociée du réel en se combinant avec des règles de composition issues de la tradition, en faisant appel à des légendes, des textes, des signes complémentaires ou des suppléments imaginaires qui s'ajoutent à l'image brute. Elle est aussi une écriture, qui fait proliférer ce que Jacques Derrida appelle l'espacement : écarts, redoublements et dédoublements, réversions, photomontages, surimpositions, collages, artefacts.

Ce qui a émergé avec la photographie dans les années 1830 - cette région de l'espace dont le sujet est exclu - reste ineffaçable. C'est un bouleversement qui s'est étendu à tous les champs visuels, et au-delà, jusqu'au modernisme et à la crise actuelle de la représentation. Pour se dissocier de la photographie, l'art devient autonome, les oeuvres s'auto-définissent. Les processus déclenchés par la photographie sont inarrêtables : perte de la maîtrise visuelle, délitement des frontières, substitutions, mises en abyme, fétichisation du corps. Les catégories sont brouillées, les chaînes référentielles ne trouvent plus de limites. On parle d'imposture. Les pratiques picturales et sculpturales se redistribuent, du surréalisme (qui privilégie la photographie pour illustrer sa théorie de l'automatisme psychique) à Marcel Duchamp (et son Grand Verre qui ressemble à une plaque photographique où le sujet se perçoit comme double et clivé), Pollock, au Body Art, au Land Art ou au postmodernisme.

Malgré les efforts pour les rapprocher dans l'espace d'exposition, le discours photographique reste étranger à celui de l'esthétique ou de l'art. Il l'était à l'époque d'Atget, et l'est toujours avec les stéréotypes de la photographie d'amateur ou la vidéo moderne, qui joue sur les paradoxes.

 

 

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Formulations à partir de ce texte (les têtes de chapitre sont entre crochets) :

 

[La photographie explore une région de l'espace dont nous sommes, en tant que sujets, naturellement exclus]

[Dans l'art moderniste, l'auto-définition des oeuvres se fait le miroir de la conscience de l'artiste ou du spectateur, tout en lui restant irréductiblement étrangère]

[On peut rendre compte du surréalisme par un dispositif théorique : l'"espacement"]

[Avec la photographie, les règles de l'indexation (trace, indice, empreinte) se substituent à celles de la représentation iconique]

[La photographie surréaliste brouille les catégories et érige à leur place le fétiche, l'informe, l'inquiétante étrangeté]

[Le discours propre à la photographie n'est pas esthétique : c'est celui du simulacre, où la fausse copie produit un effet de réel]

[Marcel Duchamp redistribue les pratiques picturale et sculpturale selon le moule de l'indice]

[La photographie naît dans les années 1830; elle s'industrialise dans les années 1860-80]

La photographie rend compte de l'espace en abyme de la ville moderne, qui - comme le surréalisme - produit en permanence une chaîne de références illimitée

La photographie a été vécue dès son invention comme le lieu ultime de la trace

La photographie, qui parle toujours le langage du collage, est l'ennemie naturelle de l'idéal d'autonomie de l'art

Avec la photographie d'amateur et ses stéréotypes, la possibilité d'une différence esthétique s'effondre de l'intérieur

Le modernisme et la photographie, qui couvrent presque exactement la même période, ont été tous deux accusés d'imposture

L'exploration du double - ce principe structurel, formel et thématique de la photographie surréaliste - témoigne de la perte par le sujet de sa maîtrise visuelle

En photographie, le redoublement est un moyen privilégié de se dissocier du réel, par production d'espacement

La fétichisation du Nu Féminin en photographie tient à son essence même : produire une image artificielle, qui exhibe le réel en se substituant à lui

En photographie, la représentation est mise en abyme en tant qu'elle intériorise son propre processus de fabrication, et qu'un signe en interprète un autre

L'univers de la photographie est celui de l'archive et non celui du musée

La photographie ne saurait produire tous ses effets qu'en restituant sa valeur de rupture, sa faculté d'irruption

La lumière est la forme d'écriture propre à la photographie

L'appareil photographique opère comme un substitut de la main qui écrit ou dessine

En marquant, entre ses éléments, les limites et les espacements, le photomontage dépouille la photographie du sentiment de présence et ouvre au simulacre

Au centre du projet surréaliste est le concept d'"écriture"

La photographie promeut le fantasme d'un rapport direct au réel

Le propre de la photographie est la transparence du négatif : fondamentalement réversible, elle montre un sujet dépossédé dans son être même par le fait qu'il est vu

Le regard photographique vient en supplément de la vision normale

Dans la photographie surréaliste, l'objet apparaît toujours comme un fétiche, un artefact qui se substitue au phallus, arrête le temps et dénie la différence sexuelle

Le surréalisme s'est intéressé à la photographie car elle s'ajoute au réel - comme représentation, signe ou écriture paradoxale

En dédoublant (à la façon d'un mime) les signes produits par la lumière, la photographie les rend intelligibles

Depuis le 19ème siècle, le discours esthétique s'organise autour de l'espace d'exposition

Le vidéaste contemporain doit s'enregistrer lui-même, tout en présentant un matériau qui l'exclut comme sujet

Le Grand Verre est un autoportrait de Marcel (Duchamp) où le sujet se perçoit comme double et clivé : d'un côté la mariée (Mar-), de l'autre les célibataires (-cel)

Les photographes surréalistes étaient des maîtres de l'informe - cette catégorie qui défait les frontières et déconstruit les concepts par lesquels la réalité s'organise

Eugène Atget a produit, entre 1895 et 1927, un corpus photographique d'environ 10.000 images, qui a été interprété à partir de 1925 par un discours esthétique

Des pratiques de trace ou d'empreinte, comme le Body Art, le Land Art ou la performance, révèlent l'emprise du caractère indiciel de la photographie sur d'autres formes d'art

Les peintures pré-impressionnistes de Daubigny ressemblent aux calotypes des années 1850, qui accentuent les contrastes et laissent voir le grain de l'image

Avec le daguerréotype des années 1830, on constate avec stupéfaction que la lumière donne à la nature la capacité de se reproduire elle-même

L'indice est inarticulé; il ne peut faire sens sans l'addition d'une légende, d'un texte ou d'un supplément imaginaire

Dans le tableau impressionniste, la perte d'unité résultant de l'observation directe de la nature est compensée par une composition qui respecte les règles traditionnelles

La découverte de la photographie a été vécue comme un événement extraordinaire : au carrefour de la science et du spiritisme, le visible laissait une trace

La photographie est un objet théorique qui relativise des concepts comme "artiste", "auteur", "oeuvre", "style"

La peinture de Pollock, telle que photographiée par Hans Namuth, dévoile une rupture entre "peindre le tableau"et "voir le tableau"

Les vues stéréoscopiques des années 1850-80 sont construites en fonction d'un discours spécifique (la "photographie topographique"), distinct du discours de l'art

Dans leurs publications, les surréalistes ont donné la priorité à la photographie sur d'autres types d'images

Le mythe d'origine de la peinture - le tracé, par la fille d'un potier, de l'ombre de son amant portée sur un mur - signale son caractère irréductiblement indiciel

Le Photographique, Pour une théorie des écarts (Rosalind Krauss, 1990) [LePh]

 


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Sources
KraussParcours

B1.990

YYA.1990.Krauss.RosalindGenre = -