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TABLE des MATIERES : |
NIVEAUX DE SENS : | ||||||||||||||||
Derrida, phallus, phallocentrisme, le sexuel | Derrida, phallus, phallocentrisme, le sexuel | ||||||||||||||||
Sources (*) : | Orlolivre : comment ne pas s'entendre, se sentir? | Orlolivre : comment ne pas s'entendre, se sentir? | |||||||||||||||
Pierre Delain - "Les mots de Jacques Derrida", Ed : Guilgal, 2004-2017, Page créée le 12 mai 2008 | La pensée derridienne : ce qui s'en restitue | [Derrida, le phallus, le sexuel] |
La pensée derridienne : ce qui s'en restitue | Autres renvois : | |||||||||||||
Logocentrisme, Phonocentrisme, Phallogocentrisme |
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Derrida, la colonne |
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Derrida, femme, différence sexuelle |
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Derrida / Lacan, cousinages | Derrida / Lacan, cousinages | ||||||||||||||||
Lettre divisible ou indivisible? | Lettre divisible ou indivisible? | ||||||||||||||||
Derrida, le logos, logocentrisme | Derrida, le logos, logocentrisme | ||||||||||||||||
1. Supplément absolu, présence. L'effet phallique est double. a. L'érection n'est pas un phénomène spécifiquement humain. Elle intervient tout autant chez les animaux que chez les hommes; c'est une réaction mécanique, un réflexe, quelque chose d'incontrôlable, de spontané, d'autonome, indépendant de la volonté et même du désir. Le phallus en érection se coupe de l'homme. Il devient une prothèse, une marionnette qui se dresse par elle-même, dans sa rigidité et sa dureté. C'est la dimension fétichiste du phallus, sa dimension compulsive, impressionnante mais équivoque, passablement ridicule, toujours affectée par un certain degré de bêtise qui est son essence même. b. Le phallus est le lieu de l'accroissement, du gonflement, du grossissement. Quand il se dresse de façon permanente (à la façon du dieu grec Priape, avec son membre ithyphallique), il est la marque de la supériorité du souverain. Il faut qu'il reste là, toujours présent, intact, indemne, sain et sauf, indivisible. Son érection figure la loi du plus fort, du majestueux, dans sa dignité et sa grandeur, au-delà de toute multiplicité calculable. Il ne supporte ni chute, ni déchéance, ni détumescence. Il lui en faut toujours plus : plus de hauteur, plus de puissance, plus de pouvoir. Son débordement, insatiable, excède toute limite. Jacques Derrida le qualifie de supplément absolu.
2. On ne peut ni relever, ni spiritualiser, ni signifier la castration. Du récit d'Edgar Poe sur la Lettre volée, Jacques Derrida tire une conclusion contraire à celle de Lacan. Pour Lacan, le contenu de la lettre volée n'a pas d'importance. Ce n'est pas son texte qui compte (ou son sens), mais sa place dans la structure : celle d'un signifié général, toujours le même. Une fois sa dette acquittée, le signifiant-phallus (ou signifiant transcendantal) revient vers son origine sans se détruire ni se diviser. Dans cette interprétation métaphysique de la circulation de la lettre, la figure privilégiée de la castration, définie à partir de la privation pénienne, est la femme. Lacan fait du phallus "le signifiant destiné à désigner dans leur ensemble les effets de signifié". En faisant de la castration un symbole, il tente une relève, une spiritualisation. Mais cette spiritualisation ne peut qu'échouer. Selon Nietzsche, le christianisme, qui voudrait spiritualiser la passion et la sensualité, est un castratisme (c'est son mot). On peut interpréter la psychanalyse dans cette direction, bien que Freud, avec la pulsion de mort, ait abandonné l'idée que le refoulement œdipien puisse "réussir". Le phallocentrisme ou phallogocentrisme, qui implique le logos, est une tentative de spiritualisation du même genre. Pour séduire, ouvrir le désir, la femme peut s'inscrire dans cette logique de la castration, mais elle peut aussi s'en distancer, en suspendre la croyance. Il lui arrive dans la vie courante de s'y laisser aller par ruse ou simulacre, bien qu'au fond, cette histoire de castration ne soit pas son affaire. Pour Derrida, la lettre n'a pas de destination assurée. Elle est depuis le départ en dérive, en errance. Les personnages du récit de la Lettre volée n'occupent pas une position déterminée. Ils se dédoublent, occupent toutes les places dans un espace débordé, désorganisé, déhiérarchisé. S'il n'y a aucune place privilégiée pour un signifiant phallique, la chute qui menace l'érection ou la station debout peut être analysée comme un aveuglement, une désorientation, une défaillance qui, d'avance, était déjà là. La castration ne fait pas irruption, comme le pensait Freud, à un stade déterminé (oedipien), ni dans des circonstances déterminées (le meurtre du père). De la castration, il y en aura toujours déjà eu.
3. Phallogocentrisme Le concept de sujet dont nous héritons est dominé par un "phallocentrisme", "phallogocentrisme" ou "carno-phallogocentrisme" qui soumet la femme, l'animal et l'enfant à un possesseur de la nature supposé détenir aussi la parole vive. Cette chose-là (phallique) parle d'elle-même. Comme toute voix, elle s'entend parler, et se donne raison quand elle s'entend. C'est le lieu du propre, de l'ipséité, un lieu idéal où la vérité se dit. En se lieu, les éléments hétérogènes, extérieurs, les restes textuels ou anatomiques, les traces, doivent être déniés. La castration est irrecevable.
4. Bander devant "rien". Hegel, Genet, Lacan, comme Freud lui-même, perçoivent, eux aussi, ce "rien". Par clins d'oeil, ils évoquent ce qu'aucune métaphysique ne peut supporter : une castration absolument dépourvue de sens. Quand Hegel mentionne les colonnes phalliques de l'Inde, qui ne sont pas des signifiants, n'ont ni signification ni signifié et n'occupent aucune place déterminable, il évoque cette castration (sans le savoir). Genet, qui exalte la beauté et glorifie le phallus, bande devant des fleurs tombales. La fleur chez lui, qui porte son nom, paraît transcendantale. Mais son écriture tourne en dérision tout ce qui se dit de la vérité et du phallus. Elle opère comme un poison qui inverse les valeurs. L'érection devant elle est postiche, sans socle, sans fondement, sans clé universelle. La fleur, soudain, ne signifie plus rien. L'écriture en colonnes de Glas, "colossale" donc phallique, fait proliférer les marges qui rendent incertaines les délimitations, les coupures. Elle sonne ainsi le glas d'une reléve possible. Mais si d'une part, aucun au-delà de la castration n'est à attendre, d'autre part, il faut bien distinguer les textes et les signatures. Ce double bind ou double bande met en jeu deux désirs inconciliables ; linéariser (la castration) / délinéariser (éviter la castration).
5. Dissémination, perte du sens. Jacques Derrida propose un "autre" concept du phallus (non lacanien). Comme la lettre et le signifiant, le phallus derridien est divisible. Dès le départ (qui n'est pas une origine), il commence par disséminer. Il divise, se divise, erre et multiplie les partitions. S'il est qualifié de "sème", ce n'est pas au sens de la sémantique mais de la semence, de la différence ou différance séminale qui opère au-delà de la présence. Il n'a ni lieu, ni trajet, ni signification. On peut le décrire comme une colonne vide, transparente et réfléchissante. Cette colonne (ou double colonne, comme dans Glas) est celle de la fleur phallique c'est-à-dire du glas de la signification, du sens, et aussi du signifiant. Plutôt que d'utiliser le nom, "le" ou "un" "phallus", il faut parler de mouvement phallique. Comme dans l'écriture de Francis Ponge, érection et détumescence vont ensemble. Le mouvement est toujours double : il exhibe la présence - le fétiche prévisible et calculable - et il menace la signification, dans une course infiniment ouverte, disséminante et incalculable.
6. Le sexuel. La position du sexuel dans l'œuvre derridienne pose question. Alors que, pour Freud, la dimension du sexuel est irréductible et le privilège de la libido l'une des pierres de touche de sa pensée, Derrida parle rarement du sexuel comme tel, et va jusqu'à donner la priorité à la pulsion d'emprise (qu'il nomme pulsion de pouvoir) pour régler l'économie du plaisir, au détriment de la pulsion sexuelle. Cette tendance, qui caractérise d'autres penseurs de son époque - y compris des psychanalystes, conduit à la mise en avant d'une dissension sexuelle qui vient perturber la dualité apaisée des sexes. Si la dissémination ne touche pas prioritairement la pulsion sexuelle mais le mouvement même de la différance, quel que soit son point d'impact, alors plus rien ne vient distinguer le sexuel d'autres lieux qui pourraient s'inscrire dans une topique. L'émergence de la différence des sexes n'est plus qu'un événement secondaire dans l'histoire des espèces. La castration pourrait se trouver désexualisée. Mais alors que resterait-il de la pensée freudienne, sur laquelle il continue à s'appuyer ?
7. Circoncision, judaïsme. Une des figures de la castration chez Derrida est celle de la lettre (i). Majuscule (émajusculée), elle est phallique. Le I dissémine d'avance (c'est-à-dire avant toute psychologie, y compris freudienne) l'unité du sens. Minuscule, c'est une castration simulée. Avec le point qui se coupe et se décolle du corps, le (i) est la lettre qui s'écarte de son propre, sans toutefois s'en retrancher. Derrida associe ce simulacre à la circoncision : se détacher sans vraiment se détacher (du corps), une décapitation non transcendantale. C'est aussi ce mot de castration qui est privilégié dans la déconstruction du texte de Hegel, L'esprit du judaïsme. Si Hegel ressent une telle horreur, un tel dégoût devant le judaïsme, c'est parce que, dans sa problématique de la coupure, de la séparation, de la loi, la structure conceptuelle de la castration est déjà opérationnelle (sans quoi on ne pourrait expliquer son renvoi à la figure de la Gorgone). Une castration qui ne pourrait pas être "relevée" par l'amour, la famille, la réconciliation, c'est insupportable pour Hegel - mais irréductible selon Derrida. Exaltant l'amour, Hegel attribue aux Juifs, et à eux seuls, la coupure qu'il cherche à tout prix, à travers la dialectique spéculative, à surmonter. L'Abraham biblique symbolise cette coupure, lui qui se sépare de sa famille, de sa terre, de son pays, de sa religion, qui accepte d'immoler son fils chéri, et qui en outre pratique sur lui-même la circoncision. Mais bien qu'il ait rompu avec l'alliance, Derrida reste fidèle à la circoncision. Son sexe, il ne peut le décrire que retranché, du mot hébreu karet qui n'est pas la castration, mais le retranchement de la communauté, et pour lui de toute communauté.
8. Le phallique et l'œuvre. L'apothéose de la scène "bander devant rien", c'est le chef d'oeuvre, cet habitat colossal où le nom, la signature, se détache du corps. Peut-être Derrida a-t-il cherché, par Glas et par l'ensemble de son oeuvre, une telle apothéose : c'est son érection, sa jouissance, et il ne le nie pas.
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-------------- Propositions -------------- -Assumer ou dénier la castration, cela revient au même : c'est donner un sens au phallus, lequel n'a ni lieu, ni trajet, ni signification, ni aucune possibilité de relève -Le phallus n'occupe aucun centre, aucun lieu naturel, il n'est qu'un des éléments d'une chaîne infiniment ouverte, d'une dissémination qui menace la signification -Le phallique, dans sa différence, a une double valeur : sa pure et propre présence / son fantôme, son spectre, son fétiche -Ponge obéit à une double injonction : 1/ (érection) instituer ou monumentaliser sa signature 2/ (détumescence) la laisser se décomposer dans le texte -Le phallus, interprété métaphysiquement, est un signifiant transcendantal, le corrélat d'un signifié premier (par exemple la castration ou le désir de la mère) -Un schème domine le concept de sujet : la virilité carnivore, avec son carno-phallogocentrisme -La défense de la raison suppose un tiers exclu, un irrecevable : la femme, la castration -Mettre entre parenthèses le reste textuel (Hegel) ou l'anatomie (phallocentrisme de Freud ou Lacan), c'est la même dénégation -Originairement, le phallus est une marionnette, une érection automatique, prothétique en soi, coupée de l'homme -La pulsion d'emprise ou de pouvoir est irréductible à aucune autre : c'est elle qui règle le principe et l'économie du plaisir -La dissémination est la forme langagière de la dissension sexuelle, ce mal qui vient perturber la dualité apaisée des sexes (Geschlecht) -L'axiome de la lecture heideggerienne, c'est qu'un lieu (Ort) de rassemblement, une pointe indivisible, oriente toutes les forces -L'érection phallique n'est propre ni à l'homme ni à l'animal, mais dans sa permanence ithyphallique, elle est un attribut spécifique du souverain -Absolument grand, au-dessus de toute grandeur mesurable et au-delà de toute multiplicité calculable, le Un souverain est plus d'un, plus qu'un -Une bêtise essentielle caractérise le phallique comme tel et son érection permanente : le souverain -La logique de la souveraineté tend vers un débordement phallique insatiable, l'érection d'un supplément absolu qui excède toute limite, jusqu'à la perte du sens -Entre maison, sculpture et architecture, les colonnes phalliques de Hegel, lisses ou entaillées, occupent une place indéterminable, "avant" la famille ou l'Etat -La double bande de Glas met en jeu deux désirs inconciliables : délinéariser ("J'érige pour que vous ne puissiez pas me châtrer") / linéariser ("Je me châtre moi-même") -Comme un collier ou une toison, "Glas" fait proliférer les marges où se dissimulent coupure, domination, castration, au prix d'un "Je m'écarte", "Je m'écrase", qui est aussi castration -Avec l'écriture colossale de "Glas"; il y va du glas de la signification, du sens et du signifiant -Dans le texte de Genet, la toison pubienne (erion), érigée en tissu d'écriture, tourne en dérision tout ce qui se dit de la vérité ou du phallus -Dans la "fleur" de Genet - qui, d'un coup de glas, ne signifie plus rien -, la déconstruction pratique de l'effet transcendantal est à l'oeuvre -Les aveugles sont les êtres de la chute, la manifestation de cela même qui menace l'érection ou la station debout -Le I (majuscule) dissémine d'avance l'unité du sens -Le (i) est la lettre qui s'écarte de son propre -La circoncision, castration simulée, coupe sans retrancher; du point sur le (i), elle fait un élément prononçable -Mon sexe, je ne peux le décrire qu'à travers des millénaires de judaïsme, alliance rompue sur tous les plans -Le christianisme est un castratisme - où la femme se châtre elle-même -La femme, comme figure de la castration ou de la vérité, fait revenir, en sa demeure, le phallus ou le signifiant -Pour la femme, la castration n'a pas lieu; elle ne croit pas en sa vérité mais elle en joue pour séduire, ouvrir le désir -La gloire du chef d'oeuvre, son habitat colossal, c'est qu'il fait bander devant un cadavre décapité, devant des fleurs, devant sa propre signature, devant rien -Le phallogocentrisme est une chose qui parle d'elle-même : elle a toujours raison quand elle s'entend -La voix est le lieu idéal du phallus - sur sa présence s'édifie le "phallogocentrisme" -L'effet phallique tient ensemble les deux sources de la religion : ce qui est intact, indemne, automatique (le machinique); ce qui se gonfle de présence vivante (la foi) -Abraham est si attaché à la séparation qu'il impose la circoncision, ce signe ou ce simulacre de castration, à lui-même et à ses descendants -La dissémination passe par une colonne transparente, réfléchissante - phallus vidé de lui-même ou tour de Babel - où se joue le déplacement des marges -Dans la lecture hegelienne du judaïsme, sa loi et ses coupures, on peut lire la structure conceptuelle de la castration -Selon Hegel, la tragédie juive est laide, abominable, elle ne peut éveiller que l'horreur ou le dégoût - qui sont ceux du même Hegel devant la castration -Selon Hegel, le Juif circoncis est comme la tête de Méduse qui transforme en pierre tout ce qu'elle regarde ; une pure castration, sans relève possible |
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Création
: Guilgal |
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Idixa
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Derrida DerridaPhallus AA.BBB FDVParcoursME.MMO DerridaCheminementsZZ.PH.ALL MQiDerridaLacanEP.LLO LettreDerridaLacanJD.LJD DerridaLogocentrismeAD.LEF BP_DerridaPhallus Rang = MGenre = - |
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