Derrida
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Derrida, ses livres                     Derrida, ses livres
Sources (*) :              
Jacques Derrida - "Trace et archive, image et art", Ed : INA, 2002,

Trace et archive, image et art (conversation à l'INA avec le Collège iconique, le 25 juin 2002) [TAIA]

   
   
   
                 
                       

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Table

Le 25 juin 2002, une soirée a été organisée à l'INA pour commémorer les dix ans du dépôt légal de la radiotélévision. Elle est retranscrite dans un texte de 43 pages, numérotées ici de la page 96 à la page 139. Le film D'ailleurs Derrida réalisé par Safaa Tafhy a été projeté au cours de cette soirée et commenté par Jacques Derrida. Dans un livre paru en 2000 et intitulé Tourner les mots, la réalisatrice et le philosophe avaient déjà livré un premier commentaire. Les participants à cette soirée étaient : François Soulages, Gérald Cahen, Patrick Charaudeau, Michèle Katz, Gérard Hubert, Jean-Michel Rodes, Serge Tisseron, Marie-José Mondzain.

Le texte de la retranscription a été publié en 2013 dans le recueil intitulé "Penser à ne pas voir, Ecrits sur les arts du visible 1979-2001" [ESAV], et publié à nouveau, encore une autre fois, aux éditions Galilée, en 2014, dans Hommage à Jacques Derrida, par Daniel Bougnoux et Bernard Stiegler.

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On ne sait qui a donné à cette retranscription son titre : Trace et archive, image et art. En tous cas, dans les réponses aux questions qui lui sont posées, Jacques Derrida évoque la trace, l'archive et l'image, mais il ne parle pas d'art, il parle d'oeuvre, ce qui n'est pas exactement la même chose. En quoi le film de Safaa Fathy est-il une oeuvre? Ce qu'il "met en oeuvre", en tant qu'oeuvre (dit Derrida), c'est la question de l'espacement. Il passe d'un lieu à un autre, d'un temps à un autre, il reste dans un entre-deux et ne referme jamais l'identité sur elle-même. Bien qu'il soit, comme tous les films, sous la loi de l'image, ce film est monté de façon à répondre à cette loi par des mots, des déplacements, des improvisations, des interruptions et des digressions qui font événement. Tout l'art du cinéaste, c'est de soumettre la parole à l'image, mais sans lui faire violence, en la donnant à entendre. Le mot fonctionne comme une image, mais porte en lui une réserve de pensée, un reste intraduisible. Ce qui fait oeuvre dans un film, c'est ce reste, cette restance, ce qui n'apparaît qu'à l'autre et que nul ne peut se réapproprier.

Le montage est un art de la coupure. En sélectionnant un matériau, on en élimine un autre qu'on laisse au secret. Le réalisateur coupe, il sélectionne des images qui sont, comme toute image, séparées de leur référent. En montrant Jacques Derrida comme personnage public, Safaa Fathy fait apparaître à quel point la frontière avec le privé est mouvante et indécidable. Elle ne rompt pas l'alliance avec ce qu'elle montre, elle n'oblige pas la personne Jacques Derrida à trahir ses secrets [ce qui aurait été difficile], mais cette alliance reste hétéronomique, dissymétrique, comme une circoncision.

En tant que documentaire, le film est une archive. Il tend à garder, maitriser, interpréter des traces (la pulsion d'archive), tout en contribuant à la destruction de ces traces par la sélection et le montage qu'il opère. Derrida s'est prêté à ce jeu. C'était pour lui à la fois une menace et une quête d'identité, un mouvement qu'il qualifie d'auto-immunitaire. Sans doute a-t-il envoyé au spectateur une sorte de lettre mais, comme il le précise lui-même, une lettre n'arrive pas toujours à destination. On ne peut jamais se la réapproprier, pas plus que la voix. Et lorsqu'on cherche à réparer un défaut, une malfaçon, comme le carrelage d'une certaine cuisine d'El Biar, il se peut qu'on arrive à la déconstruction.

 

 

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Formulations à partir de ce texte (les têtes de chapitre sont entre crochets) :

 

La loi d'auto-immunité, qui diffère indéfiniment l'arrivée au but, est irréductible, invincible et indépassable

Un film est un art de la coupure : ce qu'il "fait", c'est qu'on ne puisse pas se réapproprier cette chose-là, qui n'apparaît qu'à l'autre

Dans un film structuré selon la nécessité et la loi de l'image, l'iconique a autorité sur le verbal

L'art du cinéaste, c'est de soumettre, sans violence, la parole à l'image, tout en donnant à entendre cette parole

Ce qui fait oeuvre dans un film, c'est là où le mot fonctionne comme une image, là où il garde sa réserve de pensée discursive, théorique, philosophique

L'image n'a de valeur iconique - ou filmique - que là où elle se passe de ce qu'elle est censée représenter, de son référent

Il est toujours possible qu'une lettre n'arrive pas à destination; et si l'autre ne contresigne pas l'envoi, il y a possibilité de parjure ou de trahison

On n'a jamais rencontré le moi nulle part; il n'y en a pas de donné, de sûr, de stable, de constitué - c'est un mouvement dont émane la trace

En tant qu'oeuvre, un film "met en oeuvre" la question de l'espacement

Aujourd'hui, la frontière entre public et privé est indécidable, elle se déplace constamment - mais le secret, au-delà, en-deça et en-dehors de cela, doit rester séparé

Un mouvement irrésistible pousse à garder, maîtriser, interpréter les traces : la pulsion d'archive

S'"il y a" du moi ou de l'objet, c'est par restance de la trace - au-delà de toute ontologie

La question du secret, des limites de l'archive, est aujourd'hui un enjeu politique majeur

Il appartient à la structure d'une trace de pouvoir s'effacer, s'oublier, se perdre; archiver, c'est sélectionner ce qu'on garde

Le concept de trace est coextensif à l'expérience du vivant en général : dès qu'il y a renvoi à l'autre ou à autre chose, il y a trace

Pour les autres, la voix est ce qu'il y a de plus identifiable; mais pour soi, au contraire, elle est ce qu'on ne peut pas se réapproprier

La circoncision coupe sans mutiler, tandis que l'excision mutile

Par la déconstruction, Jacques Derrida a voulu réparer l'injustice faite à son père

Trace et archive, image et art (conversation à l'INA avec le Collège iconique, le 25 juin 2002) [TAIA]

 


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Sources
DerridaBiblio

2002_TAIATA

YYA.2002.Derrida.Jacques

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