Depuis plusieurs siècles, les axiomatiques se sont multipliées, les règles formelles se sont faites plus explicites, mais le principe n'a pas changé. La raison continue à résider dans les règles du jeu langagier. Même si l'expérimentation scientifique, qui tient compte de variables empiriques, ne fonctionne pas selon ces règles, il faut les observer pour rester dans le champ de la connaissance.

Cela n'empêche pas de s'interroger sur la justification de ces règles. Le classicisme leur attribuait un fondement métaphysique; la modernité critique en analyse la finitude, et la postmodernité en reconnaît la circularité. Mais finalement c'est l'idéologie des technosciences qui prévaut. Si ces énoncés procurent plus de pouvoir, s'ils sont plus performants, s'ils font gagner du temps, aller plus loin, ils sont acceptés. Le professionnel remplace le savant. La connaissance n'a plus sa fin en elle-même, mais dans les compétences cognitives. La raison d'Etat rejoint la raison de savoir, dans une confusion qui n'est pas étrangère aux monstruosités de la Terreur et aux crimes du XXème siècle.