Avec la combinaison du téléphone portable et de l'Internet, on peut avoir également accès partout à tous les services. Le chez-soi, dissocié de l'adresse, se distribue dans tous les lieux. Cette nouvelle mobilité dissout la forme même du réseau (toile d'araignée, filet, tissu). Il n'y a plus de coordonnées cartésiennes : rien ne distingue les trois points du plan où je suis, où que je sois. Les réseaux se fondent en un court-circuit général. Notre habitat devient topologique : de n'importe quel point à n'importe quel autre, il n'y a plus de distance mesurable.

Dans ce nouvel espace, les messages reprennent la forme de la parole. Alors que l'écriture et l'imprimerie laissaient la voix en arrière, cette nouvelle révolution rétablit l'oralité. Elle instaure entre l'écrit et la parole une synthèse nouvelle. La loi dé légéreté et de mobilité croissante se généralise à toute information. Dans un monde continu et sans séparation, la voix a l'avantage de l'instantanéité. Sa propagation est foudroyante. Son chuchotement se transporte au-delà des océans. Sa volatilité, plus égalitaire que l'écrit, fait retour. Elle accède au temps réel où l'écrit, alourdi par les imprimantes, ne peut atteindre. Cette situation est plus égalitaire car tout le monde parle, mais beaucoup moins écrivent et lisent.

C'est désormais l'écrit qui se met au service de la parole. Il y a démocratisation. Ce n'est pas qu'un changement de pratique : c'est une mutation anthropologique.