L'oeuvre d'art s'impose comme digne d'attention par elle-même. Elle n'est pas réductible au monde auquel elle appartient. Elle se détache de son contexte. Tout un système de cadrage et de limitation signale cet écart, qui indique un autre monde. Elle ne témoigne pas d'un monde constitué, car par sa nouveauté (hidouch), elle le fonde, ce qui nous oblige à modifier notre propre regard sur le monde. Comme l'artiste, nous devons renoncer à notre savoir établi, fabriquer nous-mêmes une nouvelle manière d'ordonner le monde, nous fier à des signifiants et des signifiés qui n'existaient pas auparavant. La vérité y est à l'oeuvre comme ouverture-dévoilement, mais aussi comme obscurité-dissimulation. Lumière et secret coexistent.

Le monde (olam) devient caché (elem). Leolam (pour le monde) devient leelem (pour disparaître). Ce qui est créé ne peut pas être maîtrisé, ce qui est donné dans un présent est aussi retrait.