Le cinéma est une écriture des mouvements : ceux des acteurs, des objets mobiles apparaissant dans le film, des lumières, du cadrage, de la focale, du montage, etc... Ces mouvements viennent se combiner avec le son et les mots. Si on les laissait tous dans un film, il serait trouble, mal réglé, bancal, mal tiré, etc... Monter un film, c'est rattacher chaque scène à la logique d'un plan, c'est éliminer des rushes et des chutes, c'est soumettre les mouvements à la représentation, à la narration, au temps sonore, au langage. C'est construire une impression de réalité.

Un mouvement non ordonné est une simple dégradation d'énergie, une différence stérile qui ne renvoie à rien et ne peut pas être rentabilisée. Il est comme une jouissance, il déverse les forces au prix du délabrement de l'ensemble. Mais le mouvement du cinéma est valorisable, il donne lieu à d'autres objets. Il ne consume pas la jouissance, il la mime.

Dans l'art, la force érotique est investie, déployée et brûlée en vain. C'est ce qui rend intense la peinture d'aujourd'hui. Pour que le cinéma ne soit pas une force de l'ordre, il faudrait qu'il produise de vrais simulacres, non consommables, soit par immobilité, soit par excès de mouvement : c'est ce que Jean-François Lyotard appelle l'acinéma.

Dany Carrel dans Piège pour Cendrillon (Andre Cayatte, 1965)

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