Pour qu'un performatif réussisse, il faut qu'il existe une procédure conventionnelle (un rituel, une phrase) dont il est reconnu qu'elle produise un certain effet. Par exemple, si je dis "Nous voilà divorcés!" dans un pays où le divorce n'existe pas, ma phrase est sans effet (elle n'est ni conventionnelle, ni reconnue). Si je dis "Je vous provoque en duel!" à quelqu'un qui s'en moque, elle n'a pas d'effet non plus (c'est la triste histoire de Don Quichotte). Même une phrase conventionnelle, correcte et reconnue, prononcée par quelqu'un qui possède une autorité authentique, peut être rejetée par l'un de ses destinataires. Que ce destinataire s'expose à des sanctions ne change rien à cette possibilité de principe. Il y a toujours une incertitude [virtuelle], la possibilité d'un défaut dans les circonstances ou la formule conventionnelle, d'une évolution dans les usages (par exemple si la provocation en duel devient obsolète) ou d'un autre obstacle qui conduise à la non-reconnaissance de l'action.

Il arrive fréquemment qu'on ne sache pas jusqu'où une procédure peut s'étendre, que ses limites demeurent vagues, que des cas difficiles et marginaux la mettent en question. On ne peut jamais être certain qu'un performatif réussisse.