La métaphore constitue l'aspect vivant du langage. Elle transfigure la représentation en l'éclairant sous des attributs nouveaux. Que cela soit conscient ou pas, elle est toujours présente dans les oeuvres d'art. Dans le tableau ci-contre, l'Allée de Saint-Jacques peinte par Gainsborough en 1783, on voit des dames en promenade. Ces dames ont quelque chose de particulier : elles sont transfigurées en fleurs, ce qui donne l'impression qu'elles ne marchent pas sur une allée, mais qu'elles dérivent sur une rivière. Un tableau qu'on pourrait prendre pour un témoignage sur la mode Regency devient une métaphore du temps et de la beauté.

Les métaphores mettent en oeuvre une activité particulière de l'esprit : sortir de soi-même, faire de chacun une autre personne. Si aucune paraphrase ni aucun résumé d'une oeuvre d'art ne peut exercer la même emprise que l'oeuvre elle-même, si la signification d'une oeuvre ne peut jamais être mise en paroles, c'est parce que la puissance de la métaphore n'obéit pas à la même logique que les éléments en lesquels on pourrait la décomposer. L'activité critique ne peut pas se substituer à l'oeuvre.