Nicolas Abraham définit l'affect à partir de quatre concepts issus de la seconde Topique freudienne : le ça, le surmoi, le moi, la réalité. Ces quatre concepts renvoient à un même noyau, auquel il réserve ce nom. On a tendance à réduire ce noyau à sa dimension émotionnelle, mais il la déborde. C'est lui qui transforme en symboles les voeux inconscients, c'est aussi lui qui génère les structures temporelles à partir des décalages entre désir conscient et voeu inconscient. Nicolas Abraham distingue quatre types de décalage, auxquelles il associe quatre figures mythiques :

- le désir conscient se réalise, mais il déçoit le voeu inconscient : Narcisse.

- tel désir conscient est attendu, mais c'est tel autre qui arrive : Ulysse.

- le désir conscient n'aboutit à rien, le voeu se pérennise : Kafka.

- le voeu inconscient se réalise dans l'ordre temporel : Hamlet.

L'affect, pôle immanent de l'appareil psychique, se réactualise continuellement. Il doit, à la fois, maintenir le désir et intérioriser le temps de l'objet-obstacle (s'identifier à lui). Il devient chaque fois plus riche et plus plurivalent, refoulant ses antécédents et intégrant de nouveaux instruments. La palette du moi s'élargit par introjections. Ce processus (s'il réussit) rend l'affect de plus en plus indéterminé, de plus en plus apte à la sublimation.

Mais si au contraire le conflit n'est pas intégré, alors des structures pathogènes se mettent en place.