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de l'oeuvre

de Jacques Derrida

Un seul mot - ou un syntagme.

         
   
Une thèse, aux limites de la thèse                     Une thèse, aux limites de la thèse
Sources (*) : Sur le scripteur               Sur le scripteur
Pierre Delain - "Pour une œuvrance à venir", Ed : Guilgal, 2011-2017, Page créée le 30 mars 2013

[On ne peut présenter une "thèse" autour de l'oeuvre derridienne sans faire jouer en elle les paradoxes et les apories du concept même de "thèse"]

   
   
   
                 
                       

Jacques Derrida a intitulé son intervention du 2 juin 1980 à la Sorbonne, qui était aussi une soutenance de thèse de doctorat d'Etat sur travaux, "Ponctuations". Pourquoi Ponctuations? Parce qu'elle n'était selon lui qu'un temps, une "apostrophe" dans un texte inachevé. Cette intervention, précise-t-il, a eu lieu juste un an après les Etats Généraux de la Philosophie, qui se sont déroulés au même endroit, à partir du 16 juin 1979. Etrange paradoxe d'accepter de "soutenir" une thèse si peu de temps après avoir aussi radicalement mis en question la place de la philosophie dans l'université, et celle de l'université dans le discours dominant et la société. On peut lire dans Du droit à la philosophie un ensemble de textes datés de 1974 à 1985, qu'on pourrait interpréter comme une véritable mise en pièces de l'idée même d'une thèse de doctorat. Et pourtant, c'est au centre de cette période que Jacques Derrida a soutenu la sienne, de thèse. Il y a là un paradoxe, une contradiction qui n'a rien de superficiel ni de marginal. On peut, à la fois, défendre activement, à la façon d'un militant, l'enseignement philosophique à l'école dès le plus jeune âge, la recherche en philosophie dans ce qu'elle de plus institutionnel, et une déconstruction radicale de la philosophie - probablement la plus radicale depuis l'émergence de ceux que la société reconnaît généralement comme des experts en philosophie (en termes de chronologie, on peut situer cette émergence plusieurs décennies avant Platon et son Académie).

Si l'on prend pour thème "le concept ou le principe de l'oeuvre chez Jacques Derrida", on ne peut éviter de se référer à une double contrainte contradictoire :

- il faut que la thèse réponde à la définition la plus classique du travail universitaire : Travail présenté sous forme d'ouvrage exposant une recherche scientifique originale et ses résultats dans un établissement d'enseignement supérieur habilité, soumis à soutenance publique devant un jury pour l'obtention du grade de docteur (définition du Trésor de la Langue Française).

- il faut aussi tenir compte du point de vue que Jacques Derrida a énoncé plus de dix ans après avoir soutenu sa "propre" thèse : Je n'ai jamais aimé ces choses, les thèses, je ne m'y suis pas souvent arrêté, et ce n'est pas seulement une question de goût. C'est la question de la philosophie, rien de moins, et de ce qui s'y accorde à la thèse, à la positionnalité (Résistances, p59, extrait d'un texte lu pour la première fois en 1992).

Comment faire pour ne pas choisir entre l'un et l'autre, pour composer quelque chose, un texte, un écrit, un ensemble de pages lisibles dans un certain ordre, qui puisse faire office de thèse sans trahir ni l'une ni l'autre de ces deux assertions?

Il faudra que la thèse elle-même n'ignore pas les principes auxquels l'oeuvre derridienne renvoie, explicitement ou implicitement. Le 2 juin 1980, s'adressant au jury qui devait porter un jugement sur sa thèse, Jacques Derrida explique qu'il a décidé d'exclure certains textes de la liste des travaux pris en considération, car ils sont, selon lui, peu recevables dans l'université, soit en raison de leur forme, soit à cause de leur inscription sur la scène performative. On peut alors se poser la question des autres textes (ceux qu'il n'a pas exclus). Ceux-là seraient-ils suffisamment classiques, suffisamment marqués par une présentation de type positionnelle, pour que les représentants attitrés de l'institution puissent leur accorder une valeur? Si l'on garde en mémoire le poids transgressif des textes derridiens des années 1970, on peut en douter. Disons que les textes retenus pour la thèse se caractériseraient par un autre positionnement du curseur, quelque part entre le conditionnel et l'inconditionnel. Ils prendraient un peu plus en considération les rites et les règles d'évaluation nécessaires à l'admission d'une "thèse", mais sans céder sur "le fond".

Cela conduit à proposer, pour celui qui s'engagerait dans une thèse, trois règles, dont la cohérence n'est pas assurée :

1°) On ne peut dissocier la "thèse de doctorat" des transformations qui affectent l'université d'aujourd'hui, ni d'un questionnement sur ses procédures de légitimation. Ce questionnement n'est pas extérieur à la thèse. Il est son coeur, son essence.

2°) On ne peut dissocier la thèse des procédures de savoir qui ont cours dans l'université. Ces procédures, avec leurs méthodes d'évaluation et leurs rites, ont contribué à produire de grands discours critiques. Elles se débordent elles-mêmes et peuvent, tout autant que des thèses, produire du "hors-thèse".

3°) La thèse ne s'adresse pas à une instance abstraite, mais à un lecteur. Elle interpelle le lecteur, l'invite à s'engager lui-même, à prendre position. L'ordre du texte n'est pas gouverné par une architectonique, mais par cette adresse.

Il aura fallu, pour en arriver là, un cheminement complexe et tortueux que la thèse elle-même tend à neutraliser - mais qui revient sans modération dans les coins, les angles et les anfractuosités du site.

 

 

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Propositions

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Cheminement tortueux vers ce qui se présente comme une "thèse"

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"Pour une œuvrance à venir" (Pierre Delain) [OPDS]

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On ne peut dissocier la "thèse de doctorat" des transformations qui affectent l'université d'aujourd'hui, ni d'un questionnement sur ses procédures de légitimation

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Les actes performatifs étant difficiles à représenter, transporter ou traduire, on ne peut les inscrire dans un genre particulier - littérature, fiction ou thèse de doctorat

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--- Pour aller plus loin dans cette démarche, il faudrait définir un autre concept, le hors-thèse. "Il n'y a pas de hors-texte", dit Derrida, mais dans le texte même, à même le texte, il y a du hors-thèse, du non-thétique.

--- La question du plan, qui semblait insoluble, s’est résolue presque immédiatement quand j'ai eu l'idée du mal radical. Les cinq sous-titres qui forment les cinq parties de la thèse me sont venus à l’esprit. Il était temps, car je me trouvais alors déjà dans la troisième année de recherche, et c’est alors seulement que j’ai pu me mettre à rédiger dans l’ordre à partir des notes que j’avais accumulées. Quand quelque chose s’impose à vous soudainement comme fil directeur, avec les atours de l’évidence, il faut sans doute se méfier. D’un côté c’est une décision assez strictement derridienne, qui vient de l’autre, sans qu’aucun calcul ne l’ait annoncée. Mais d’un autre côté c’est suspect. Il peut y avoir un jeu pervers de l’inconscient. Et l’une des difficultés dont je prends conscience aujourd’hui, c’est que cette idée de résistance au mal radical s’est imposée à moi avec tant de force que je n’ai pas songé à faire une recherche philosophique préalable. Certes j’ai lu Kant, j’ai hésité entre « mal radical » et « loi du pire », mais je n’ai pas vraiment discuté, au fond de moi, ce qui se présentait comme une évidence.

--- Le paradoxe du concept d'oeuvre de Jacques Derrida, c'est que pour l'élaborer, il faut le déconstruire. Cela passe, bien sûr, par un travail conceptuel, mais ce travail ne mène pas à des concepts, mais à des principes. Le concept lui-même est obscur, il restera une énigme, même remplacé par cette notion peut-être encore plus énigmatique, l'œuvrance. Il y a de l'œuvrance dans les ouvrages de Jacques Derrida, mais pas seulement. Peut-être certaines lignes de faille, certaines bordures instables, par exemple à la lisière des mondes académiques, artistiques, scientifiques ou politiques sont-elles plus propices. Mais ce n'est même pas sûr. Peut-être faut-il d'autres mots pour la nommer, ou peut-être les ouvrages ne sont-ils pas localisables à la manière traditionnelle de l'œuvre. Mais cela non plus n'est pas sûr. Le champ n'est pas circonscrit, il est ouvert sur la promesse d'une œuvre à venir, qu'on ne peut qu'esquisser.

--- Ecrite et publiée, la "thèse" existe comme telle. En témoignent un titre, Le concept d'œuvre de Jacques Derrida, un vaccin contre la loi du pire, différentes sortes de fichiers et aussi quelques kilos de papier qui circulent comme il se doit, dans le champ universitaire ou ailleurs, ça ne se contrôle pas. Mais il ne faut pas confondre ce qui vient derrière avec des progénitures. Derrière est derrière. Contrairement aux apparences, la "thèse" ne vit pas, elle est morte depuis le premier jour.

--- Tu n'espères quand même pas nous faire croire que ce que tu écris, là, n'a aucun rapport avec ce qui reste bel et bien, aux yeux de tout le monde, une thèse?

--- L'une des thèses de la "thèse", c'est que chaque écrit, digne de ce nom, mérite le nom de nouveauté absolue.

--- Tu devrais tourner sept fois ton doigt autour de ton clavier, avant d'écrire "absolu"!

--- L'athèse de la "thèse", c'est qu'on spécule toujours sur la mort, il est impossible de s'arrêter. Il faut bien qu'elle soit morte, la "thèse", pour nous aiguillonner, et cette mort n'est pas relative, elle est absolue, comme toute mort.

--- Mais toi, tu n'arrêtes jamais de l'écrire, ta thèse. Elle est finie, terminée, achevée jusqu'au dernier mot, soutenue depuis longtemps, et tu l'écris toujours!

--- Toi, moi, qui est-ce? Je suis ce qui vient derrière.

 


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