Pour Jacques Derrida, le mot carno-phallogocentrisme est une sorte de tautologie. Carnivore, phallocentrique et logocentrique sont trois façons de dire la même chose : le maitre de la nature, son possesseur, est aussi celui qui détient la parole vive, la voix dont le pouvoir d'idéalisation sauvegarde le logos, l'intégrité du phallus (phallogocentrisme), celui qui par son autorité, son autonomie, soumet à la loi la femme, l'animal et l'enfant. Déconstruire le sujet humain, ce serait déconstruire les partitions qui résultent de cette domination : adulte/enfant, homme/femme, humain/animal, etc...

Par la bouche, la langue, les lèvres, passent les mots, les choses, les phrases, et aussi le sein de l'autre, et aussi la nourriture, la chair qu'on mange. Dès qu'on parle de sujet (qu'il s'agisse d'un frère, d'un père, d'un mari ou encore d'une femme ou d'un végétarien - à l'époque où le concept de sujet se déconstruit, son champ s'élargit), on invoque une image, un schème, une figure virile dont la liberté passe par l'acceptation du sacrifice animal. Le chef doit être mangeur de chair, dit Derrida.