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TABLE des MATIERES : |
NIVEAUX DE SENS : | ||||||||||||||||
Derrida, la langue | Derrida, la langue | ||||||||||||||||
Sources (*) : | |||||||||||||||||
Jacques Derrida - "Du droit à la philosophie", Ed : Galilée, 1990, pp284, 309 - La philosophie dans sa langue nationale - - |
"Se référer à un idiome dans cet idiome même" (autoréférence) est un événement qu'on ne peut traduire dans un autre idiome sans l'effacer |
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Rédigeant, en français, en 1637, son Discours de la méthode, Descartes écrit : "j'écris en français, qui est la langue de mon pays, plutôt qu'en latin, qui est celle de mes précepteurs". En 1644, la traduction latine de ce texte par Etienne de Courcelles omet ce passage. En effet, pourquoi écrire "J'écris en français" dans un texte écrit en latin? Cet exemple montre les problèmes de traduction induits par l'autoréférence. Le problème se pose, en l'occurrence, pour Jacques Derrida lui-même, qui écrit La philosophie dans sa langue nationale en français, un texte qui sera prononcé en anglais et publié pour la première fois en allemand. En français, la phrase "J'écris en français" est à la fois constative et performative (je constate que je le fais et je le fais), mais si elle était traduite en anglais "I am writing in french", elle ne serait plus performative. Si elle était traduite "I am writing in english", elle serait fausse. En traduisant le Discours de la méthode dans cette langue universelle qu'était devenu le latin, le traducteur a fait le choix de détruire une partie du texte, de l'éliminer du corpus cartésien "presque sans reste" [dit Derrida], de supprimer l'événement qu'était la décision d'écrire dans la langue du pouvoir monarchique. En effaçant l'indice autoréférentiel "J'écris en français", il donne à lire ce qu'il supprime, le chemin de la langue, sa route, son cheminement d'une langue à une autre. |
Le problème posé par Derrida tient au fait que la langue se désigne doublement : (1) elle se désigne elle-même à son "propre" niveau", (2) elle se désigne comme si elle était une autre langue. Avec la traduction, cette double désignation devient contradictoire. Il en résulte un paradoxe autoréférentiel (une antinomie) du type de celle qui a été théorisée par Bertrand Russel pour la théorie des ensembles vers 1901. Quand un sujet fait une déclaration à la première personne du présent de l'indicatif, la phrase résiste à la traduction. Il y a en elle, en plus de son contenu, une affirmation irréductible d'appartenance à la langue "propre" du signataire. Il va de soi pour le lecteur que cette énonciatione est liée à cette langue. Si on la traduisait, son contenu ne serait pas seulement altéré, mais détruit [impossible d'écrire "j'écris en langue vulgaire" si l'écriture est en latin], sauf si on précise explicitement : "Ceci est une traduction" - ce qu'on peut faire pour n'importe quelle langue vivante, mais pas pour le latin - qui n'est pas une langue étrangère comme les autres [c'est une langue morte (écrite, non parlée), la langue morte dans laquelle, à l'époque de Descartes, il fallait écrire ce type de texte]. |
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Création
: Guilgal |
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Idixa
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Derrida DerridaLangue KE.LKE UTraductionAutoref Rang = LAutoreferenceGenre = MK - NG |
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