La théorie classique du speech act (celle de John L. Austin) exclut qu'une opération purement machinique soit performative. Il ne peut y avoir d'acte de langage sans la présence d'un vivant qui parle, en son nom, à la première personne. Une machine qui ne ferait que répéter la même opération, sans spontanéité, ni liberté ni intentionnalité, ne pourrait jamais produire aucun événement. Elle serait nécessairement extérieure à l'acte de langage proprement dit.

Mais cette thèse (austinienne) qui sépare l'intentionnel du machinique, qui exclut la possibilité d'un "faire" indépendant de l'intention de celui qui fait, qui rejette dans le pathologique ou le mortifère la possibilité de laisser à l'autre (au lecteur, au destinataire virtuel) la décision performative, le jugement de succès ou d'échec, cette thèse est critiquée radicalement par Derrida avec son concept d'oeuvre, sa définition de ce qui est irréductible dans l'oeuvre : qu'elle ne puisse survivre qu'à se couper de son signataire. Au contraire, dans la logique derridienne, il n'y a acte de langage que si la formule proférée se coupe de l'émetteur, que si elle se répète indépendamment de sa volonté c'est-à-dire mécaniquement, machiniquement. Et ce mécanisme est, aussi, celui du speech act.