S'adresser à l'autre, c'est lui poser en même temps la question : "Es-tu là?". Si je sais à l'avance ce qu'il va dire, si je lui dicte sa réponse, ou bien s'il n'est pas là, si son absence est irrémédiable, ce n'est pas un véritable appel [c'est le calcul de celui qui connaît à l'avance une réaction]. Pour que je puisse faire appel à lui, il faut que le destinataire ait toujours la possibilité de m'entendre ou de ne pas m'entendre. Par mon appel, je doit laisser sa chance à l'événement. Ma décision ou mon intention ne suffisent pas, ou plutôt : la seule décision que je puisse prendre, c'est de laisser prescrire à l'autre sa liberté. Mon attente ou mon désir, c'est d'inviter l'autre à rester libre. Je l'appelle pour prouver sa liberté - et c'est seulement cette liberté qui valide mon appel.