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TABLE des MATIERES : |
NIVEAUX DE SENS : | ||||||||||||||||
Derrida, date et signature | Derrida, date et signature | ||||||||||||||||
Sources (*) : | |||||||||||||||||
Pierre Delain - "Pour une uvrance à venir", Ed : Guilgal, 2011-2017, Page créée le 25 fév 2015 La signature inscrite a la fin de "Signature Evenement Contexte" (1971) - |
La signature est l'acte performatif le plus typique, le plus paradigmatique |
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Dès 1971, dans Signature événement contexte, Jacques Derrida accorde une importance particulière, et même hyperbolique, à la signature, quand il critique le concept austinien de speech act. Ce thème sera repris autour de différentes uvres, visuelles ou littéraires, dans de nombreux textes ultérieurs. A six ans décart, il y a une continuité entre les deux premiers textes consacrés par Jacques Derrida à lacte de langage, Signature Evénement Contexte (SEC, 1971) et Limited Inc a b c (première publication en anglais en 1977). Dun côté, on trouve un dernier chapitre intitulé Signatures (Marges pp390-393, reproduit dans SEC pp47-51) et de lautre côté, les deux premiers chapitres intitulés d et e [Limited Inc pp63-73] se présentent comme un commentaire de cette démultiplication des signatures. Dans ces deux chapitres, Derrida analyse le dernier paragraphe de Signature Evénement Contexte, quon peut qualifier de bloc graphique (voir ci-contre). Comme il le signale lui-même (Limited Inc p69), ce bloc graphique contient visiblement au moins trois figures de sa signature, et sans doute plus de trois [(3 + n)]. Sont immédiatement repérables : (1) limitation imprimée de sa signature manuscrite ; (2) la première lettre de son prénom et son nom inscrits en caractères dimprimerie ; (3) un paraphe, J.D., lui aussi en caractères dimprimerie auxquels on pourrait ajouter ; (4) lénonciation « Ce que jai fait et contrefais ici. Où ? Là. », qui peut être interprétée comme une sorte de signature ; (5) la reproduction de ce bloc graphique, en français et dans dautres langues, en un grand nombre dexemplaires, et lon pourrait ajouter : (6) le style unique de lécriture, qui à lui seul pourrait laisser deviner quil sagit bien dun texte derridien. Mais quel quen soit le nombre, toutes ces signatures sont fausses. Dabord, elles ne sont ni datées ni localisées (nous savons que la communication correspondante a été prononcée en août 1971 à Montréal, mais cela ne donne aucune indication sur la date effective de la signature). Ensuite, on peut toujours imaginer quelles auraient été écrites par un autre, qui naurait même pas eu besoin de contrefaire la signature manuscrite, mais seulement de la recopier. Et surtout, il ne sagit en aucun cas dune signature manuscrite authentique, mais dune copie, dune imitation de cette signature, redoublée plusieurs fois par : lécriture imprimée ; le paraphe ; la phrase énonciative écrite au passé ; etc. On peut supposer que la signature manuscrite a existé, puisquelle est reproduite, mais puisque nous ne sommes pas en présence du manuscrit, cette signature est définitivement, pour nous, absente. |
Le bloc graphique.
Et pourtant, dit Derrida, il y a des effets de signature (Marges p391), cest même la chose la plus courante du monde, il sen produit tous les jours. Comment se fait-il que ce bloc graphique, malgré sa fausseté, puisse opérer comme signature ? Comment se fait-il quon puisse lui accorder crédit, quil puisse produire un effet de croyance ? Quil puisse transformer notre rapport au texte en garantissant, au moins le temps dune lecture, lidentité de lauteur? Cest le problème général de lacte de langage, qui suppose la conjonction de deux conditions contradictoires évoquées ici, à propos de laporie n°1 de lacte de langage : - la reproduction à lidentique dun modèle, dune forme reconnaissable, archivable ; - un événement unique, absolument singulier, repéré par une date, un lieu, voire des éléments de contexte (un témoin, une trace du mode darchivage). Si Derrida a choisi la signature plutôt quun autre type dacte performatif, cest parce quelle lui paraissait la mieux à même dexemplifier cette dimension aporétique (Marges p391). Ce nest pas un hasard si le texte est intitulé « Signature événement contexte » (sans ponctuation) et non pas, par exemple « Sur la théorie austinienne de lacte de langage ». Cest la signature qui vient en premier, avant même lévénement. Conçu, en 1971, pour souligner le caractère improbable de la signature, ce bloc graphique est repris, en 1977, pour ironiser sur les thèses de John R. Searle, qui ne le mentionne pas dans sa Reply. Si John R. Searle ne sest pas intéressé à ces effets de signature, cest parce que pour lui la signature nest pas un effet, cest une présence réelle, la présence continuée dun signataire qui est supposé encore là, ici et maintenant, avec son vouloir-dire et son intentionnalité (sa maintenance transcendantale). A cette supposition, Derrida oppose un artefact fait pour montrer que toute présence en a visiblement disparu, construit pour que son caractère de simulacre apparaisse de manière aussi transparente que possible [quoique dune certaine façon, le trait dhumour de ce dispositif puisse évoquer quelque chose comme une présence du Jacques Derrida vivant]. En 1977, pour répliquer à cette Reply écrite en 1976, Jacques Derrida fait observer polémiquement que, si lui-même multiplie (volontairement) des artefacts de sa signature dans le bloc graphique afin de démontrer le caractère artificiel de toute signature, Searle multiplie lui aussi des artefacts de sa signature, mais involontairement. On peut citer : (1) une signature imprimée officielle ; (2) une mention manuscrite Copyright © by John R. Searle (qui n'est peut-être même pas écrite de la main de John Searle) ; (3) la note 1 de ce texte, I am indebted to H. Dreyfus and D. Searle for discussion on these matters, avec deux noms que Jacques Derrida interprète comme deux co-signataires ; (4) lui-même, Derrida, qui pourrait être considéré comme co-auteur de la Reply qu'il aurait "dictée", soit à travers son ami H. Dreyfus, soit par son texte. Le "sceau" de John R. Searle est donc par avance divisé (les (trois + n) déjà cités). Sa compulsion à protéger le droit d'auteur, à empêcher qu'on lui "vole" son texte, dissimule une inquiétude : que le lecteur se rende compte que sa "pensée" n'a rien d'un événement, qu'elle n'est que le prolongement d'une longue tradition métaphysique (les trois lettres a b c du titre Limited Inc a b c ). En dautres termes, là où il y a simulacre de signature, l « effet de signature » pourrait se produire ; et là où la signature se veut authentique, l « effet de signature » pourrait être en échec (une inversion du sérieux et du non-sérieux). Cest pourquoi Derrida se permet dajouter une signature supplémentaire à John R. Searle : Sarl (par suppression de deux lettres e dans son nom et allusion au caractère « commercial » du droit dauteur). De ce commentaire à cheval sur deux textes, Sec et Limited Inc a b c , on peut déduire un point important pour notre propos : la signature serait, pour Jacques Derrida, lacte performatif le plus typique, le plus paradigmatique. Ou encore : en sappuyant sur la signature, les caractéristiques de lacte de langage apparaitraient de la façon la plus pure celle qui conduira, de façon plus généralisée dans les textes ultérieurs mais déjà clairement indiquée dans ces textes-là, à déborder ou excéder le concept même de speech act. Dune part, la signature peut se démultiplier de façon pratiquement illimitée ; dautre part, il peut y avoir de la signature même sans signature, sous des formes diverses, artificielles ou anonymes, qui ne correspondent pas aux signatures en usage, par exemple Sarl pour Searle et compagnie, ou bien un bloc graphique reproductible, comme celui que nous avons reproduit ci-dessus, pour une signature authentique. Cette place à la fois privilégiée et instable de la signature, on la retrouve dans luvre performative. |
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Création
: Guilgal |
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Idixa
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Delain DerridaSignature DG.LDF USignatureActePerf Rang = OSignaturePerformatifGenre = MK - CIT |
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