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Derrida, médias, télé - technique                     Derrida, médias, télé - technique
Sources (*) : Gramophonie contemporaine               Gramophonie contemporaine
Jacques Derrida - "Surtout, pas de journalistes!", Ed : Galilée, 2016, p23

 

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Derrida, religion

En prétendant montrer la chose même, en faisant tout pour effacer les dispositifs sur lesquels ils reposent, les médias télévisuels reconduisent la foi à l'état nu

Derrida, religion
   
   
   
Derrida, croyance, fiduciarité Derrida, croyance, fiduciarité
               
                       

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La télévision donne l'illusion du direct, elle fait croire à la présence réelle de l'événement qu'elle montre. Alors que les médias traditionnels (journaux, photographies, radio) se donnent comme des reproductions décalées dans le temps (différées), elle donne l'illusion d'un réel, d'une immédiateté qui n'est que virtuelle. Elle repose sur un effet de spectralisation ou de spiritualisation dont la numérisation instantanée des images augmente encore la puissance. Mais cet effet de délocalisation ou de déracinement qui n'est qu'un artefact, une technique, il faut qu'elle le cache. La télévision ne peut se légitimer qu'en protestant contre elle-même.

Pour Derrida, la "présence réelle" produite par les télé-technologies traduit le retour du religieux. Il faut incarner les événements, les sacraliser à la façon de l'eucharistie, pour asseoir l'hégémonie politique, économique et aussi religieuse de la tradition gréco-romano-chrétienne. Le montage / cadrage qui donne l'illusion du direct est un appel à la foi. Par cette alliance entre science, technique et médias manifestée dans l'espace public, par l'effectivité de ce savoir performatif, par ce simulacre qui postule la présence de la chose même, on promet une vérité, on suscite un "je crois" ou "je te crois" ancré dans la langue et la nation, mais détaché de toute orthodoxie religieuse déterminée. Il faut, pour crédibiliser le lien social, que soit intuitivement donnée à voir la chose même. Peu de gens échappent à cette structure fiduciaire qui met la foi à nu, la rend irréductible. Le lien social moderne, contemporain, repose sur cette mise à nu.

Le progrès du "multimédia", c'est de prétendre s'effacer de mieux en mieux. Il faudrait qu'on oublie la science, la technique et aussi les procédés de montage sur lesquels ces médias reposent (ce serait une forme d'auto-destruction, d'auto-immunité). Mais si on les oubliait, on oublierait également ce qu'on doit au système médiatique (p51). Il faut donc oublier, mais sans effacer la dette.

 

 

"Cela ne peut s'appeler autrement : "je te crois". Et même pour mentir, pour tromper, pour abuser, il faut que ce "je te crois" ou "je crois à toi" ou "je crois en toi" soit à l'œuvre. Sur le sol de cette croyance nue, les médias se construisent, en essayant de reconstituer sans cesse la perception nue de cette expérience du "Crois-moi!"" (Derrida, Surtout pas de journalistes, p30).

 


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