Derrida
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                            NIVEAUX DE SENS :

                 
 
                     
                   
Sources (*) :              
John Caputo - "The Prayers and Tears of Jacques Derrida", Ed : Indiana University Press, 1997, p57

La déconstruction est une foi qui laisse la foi être la foi, une foi sans foi qui, sans dogme, à partir de l'indécidabilité de la trace, répète la structure de la foi

   
   
   
                 
                       

La trace, qui détermine les formes, est elle-même informelle, indécidable. De cette trace vient un appel sans origine déterminée, ni destination. Le croyant ne sait pas qui le sollicite, il ne peut pas savoir ce qui va venir dans ce désert. Tout dépend de cette foi réinscrite dans la mouvement de la trace. Tout ce qui s'inscrit dans la trace s'inscrit aussi dans la foi. Aucune vérité (ni théologique ni athéologique) ne peut fermer le cercle ni résoudre l'aporie. La foi reste la foi, c'est-à-dire indécidable, qui nous donne une raison de continuer à vivre.

Une foi qui ne sauverait plus le nom de Dieu, qui n'arriverait plus à le traduire, qui ne saurait plus vers qui diriger ses prières, ce serait une foi sans foi, une foi qui dériverait vers la déconstruction. Cette foi qui s'inscrirait dans le mouvement de la trace serait gouvernée par la passion de l'impossible, l'affirmation du tout autre. Dans sa destinerrance, elle ne devrait plus faire avec Dieu, mais faire sans Dieu, dans la logique du X sans X de Blanchot. Mais ce serait encore une façon de traduire le nom de Dieu, de le disséminer, le démultiplier sans avoir aucun droit exclusif sur ses figures. Eux aussi devraient retenir la leçon de Babel. La foi sans foi n'est pas la simple absence de foi, la simple négation de la foi, c'est la trace du sans inscrit dans la foi (p63), la trace obscure d'un foi qui comprend ses limites. La foi est un passage qui doit passer à travers l'aporie du sans. Cette foi qui traduit l'impossible, c'est précisément la foi.

La déconstruction de la foi n'a donc rien à avoir avec une destruction. C'est l'ouverture de la foi à la traduction, au substituable, c'est la réinscription des fois déterminées dans l'indécidable. Sans savoir, sans avoir, sans voir, elle pousse au-delà du même, du croyable. Sa fidélité va au oui, oui, sa loyauté au manque d'identité. Méfiante à l'égard de l'auto-assurance, elle a foi en l'imprévisible. En disant Oui à l'étranger, elle ne garde pour elle-même aucune foi déterminée.

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