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Sources (*) :              
Pierre Delain - "Miqra, plus d'une lecture", Ed : Guilgal, 2016-2020, Page créée le 19 novembre 2019

 

Midrach Rabba, GenÂse, tome 1, p274 (24:7) -

La fraternité est une valeur aporétique qu'on peut justifier soit par l'origine commune (père, ethnie, généalogie), soit par la descendance (avenir, promesse)

   
   
   
                 
                       

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Selon Ben Azzaï, dans le Midrach Rabba cité ci-contre à droite (Ch 24 §7), le verset "Voici le livre des filiations d'Adam" exprime le principe essentiel de la Torah. Il renvoie au verset (Gn 5:1) que Chouraqui traduit : Voici l'acte des enfantements d'Adam : au jour où Elohim crée Adam, à la ressemblance d'Elohim, il les fait. Après ce verset, dans la suite du chapitre 5 de la Genèse, vient la série nominative des descendants d'Adam, jusqu'aux fils de Noé y compris, Shem, H'am et Yaphet.

Par rapport à la question de la fraternité posée par le meurtre d'Abel par Caïn raconté dans le chapitre précédent, cette affirmation de Ben Azzaï peut être interprétée de deux façons :

- selon la note 25 ajoutée au Midrach Rabba par les compilateurs, ce qui est important dans ce verset, c'est qu'Adam est le père unique de tous les hommes, de toutes les générations. Notre appartenance commune à la même généalogie, voire la même ethnie, serait le fondement de la fraternité. Dans la note 26, le commentateur insiste encore sur la filiation à Adam.

- mais ceci semble contredit par le texte biblique qui ne parle nulle part de la position paternelle d'Adam, mais cite longuement ses descendants. Ce qui justifie la fraternité, dans ce texte, ce n'est pas le passé, c'est l'avenir. Abel est privé de descendance et sera remplacé par un autre fils, Enosh, tandis que Caïn a une nombreuse descendance, qui sera détruite au moment du déluge. Enosh est l'ancêtre de Noé, c'est-à-dire de tous les humains d'aujourd'hui. L'essentiel n'est donc pas dans le premier type de fraternité (ethnique), mais dans un rassemblement orienté vers un avenir, une promesse, celle que portait Abel et qui a été annihilée. Le texte nous invite à une fraternité tournée vers l'avenir.

 

 

Ceci est confirmé par un verset de Gen 4 cité et analysé par le Talmud de Babylone (Sanhédrin 37b) où il est question non pas du sang d'Abel mais de ses sangs, au pluriel, c'est-à-dire des futurs mondes de ses descendants, qui ont été détruits. Ce qui est grave dans le meurtre d'Abel, c'est la suppression de l'avenir que lui-même portait, et aussi la suppression de l'avenir de tous ses fils et filles virtuels. Qu'ils aient eu le même père pourrait être à l'origine de leur rivalité, plutôt que leur rassemblement.

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Il y a donc deux dimensions dans la fraternité. D'une part la solidarité des frères entre eux contre le monde extérieur. On sait que ce type de communauté, ou communautarisme, peut conduire aux pires crimes, au mal radical. D'autre part la solidarité de ceux qui se tournent vers l'avenir pour mettre en œuvre une promesse. S'il s'agit d'une promesse de justice ou d'égalité, d'une bénédiction, alors c'est d'un tout autre type de fraternité qu'il s'agit.

 


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