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TABLE des MATIERES : |
NIVEAUX DE SENS : | ||||||||||||||||
Derrida, le pardon | Derrida, le pardon | ||||||||||||||||
Sources (*) : | |||||||||||||||||
Jacques Derrida - "Séminaire 1997-98 "Le parjure et le pardon" Volume 1", Ed : Seuil, 1997, p73 - |
Le parjure n'est pas un accident : il est d'avance inscrit dans la structure de la promesse, du serment, dans l'espoir d'exister et dans le désir de justice |
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Selon Vladimir Jankélévitch, ce que les nazis reprochaient aux Juifs, c'était leur existence même. Un Juif n'a pas le droit d'être : son péché est d'exister. On pourrait, selon Derrida, généraliser cette assertion. Il y a toujours, pour chacun, une dette ou une culpabilité liée à sa simple existence. Avant la conscience, avant le Je, "avant même toute faute déterminée" (p64), pour le simple fait d'être là, il faut demander pardon. Pour pouvoir continuer, il faut supposer le pardon, un pardon à venir mais désespérément différé. Dès la naissance, l'expiation est à jamais impossible, je dois m'accuser d'un parjure. Rien ne peut effacer cette malédiction. Il faut à tout instant, sur fond d'aveu ou de repentir, dire Pardon!, réitérer cet acte de langage performatif, se racheter, transfigurer sa faute. D'un côté, cet acte engage dans un calcul, une demande de réconciliation. Il faut demander pardon à la communauté, la famille, le groupe ethnique ou religieux, en appeler à un tiers, un témoin ou à Dieu - le seul lieu d'où pourrait venir un accord. Mais d'un autre côté, il n'y a pas d'instance qui puisse l'accorder. La réponse est silencieuse. De même que les Allemands (comme peuple) n'ont pas pu répondre à Jankélévitch, le pardon n'existe pas comme possible, il n'y a que de l'impardonnable. Le pardon est urgent, il faut endurer cette expérience de l'impossible. Telle est la "vérité première et finale" (p71). Avant le don, avant l'impossible, il y a le parjure. |
Parjure! (Arturo Ambrosio et Luigi Maggi, 1909).
Les mots pardon et parjure commencent par la syllabe par, ce qui conduit Derrida à citer les deux premiers vers du poème de Francis Ponge, Fable : "Par le mot par commence donc ce texte / Dont la première ligne dit la vérité". La vérité, c'est que toute faute, tout mal est d'abord un parjure : c'est manquer à un engagement, une promesse, une responsabilité, une loi qu'on aura juré de respecter. Ce n'est pas un accident : "Le parjure est d'avance inscrit, comme son destin, sa fatalité, sa destination inexpiable, dans la structure de la promesse et du serment, dans la parole d'honneur, dans la justice, dans le désir de justice" (p73). Dès le "premier matin du face-à-face" (dans le vocabulaire de Lévinas), "la justice même me fait parjurer et me précipite dans la scène du pardon" (p74). Et voici un paragraphe à citer intégralement : "Je dois demander pardon - pour être juste. Entendez bien l'équivoque de ce "pour". Je dois demander pardon afin d'être juste, pour être juste, en vue d'être juste; mais aussi bien je dois demander pardon pour être juste, pour le fait d'être juste, parce que je suis juste, parce que, pour être juste, je suis injuste et je trahis. Je dois demander pardon pour (le fait) d'être juste. Parce qu'il est injuste d'être juste. Je trahis toujours l'un pour l'autre, je parjure comme je respire. Et c'est sans fin, car non seulement je demande toujours pardon pour un parjure, mais je risque toujours de parjurer en pardonnant, de trahir quelqu'un d'autre en pardonnant, car on est voué à toujours pardonner (abusivement donc) au nom d'un autre". |
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Création
: Guilgal |
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Idixa
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Derrida DerridaPardon CL.MML UParjureAvant Rang = MParjureAvantGenre = MH - NP |
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