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TABLE des MATIERES : |
NIVEAUX DE SENS : | |||||||||||||||||
Derrida, le pardon | Derrida, le pardon | |||||||||||||||||
Sources (*) : | Le prophète Élie, vers un fin silence | Le prophète Élie, vers un fin silence | ||||||||||||||||
Jacques Derrida - "Séminaire 1997-98 "Le parjure et le pardon" Volume 1", Ed : Seuil, 1997, pp92-93 - |
Le pardon est à la fois impossible et essence du possible, pouvoir absolu, puissance au-delà de la puissance, verticalité du haut vers le bas |
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Jacques Derrida analyse le monologue de Portia dans la pièce de Shakespeare, Le marchand de Venise. On ne peut pas commander la pardon. S'il est pur, il est sans limite, sans norme, libre, gratuit, gracieux. Soit on l'accorde, soit on ne l'accorde pas, sans justification ni explication. Il tombe du haut comme la pluie. En tant qu'acte de langage, performatif, il se présente comme un don de bonté qui prétend échanger un bienfait contre un méfait. Il introduit une réciprocité (possible) même si au final le méfait reste ineffaçable (impossible), par un mouvement vertical, hiérarchique, du haut vers le bas. Celui qui pardonne est le souverain, il affirme sa toute-puissance, sa grandeur absolue. Ce n'est pas seulement le plus de sa puissance, explique Derrida, c'est plus encore, "le superlatif de la puissance", "le plus haut de la puissance et plus que la puissance, au-delà de la toute-puissance". Or cet au-delà, cette surenchère dans l'au-delà, c'est une retrait. Le summum du pouvoir, son sommet, sa pointe, la plus exigeante affirmation d'un "je peux", c'est de faire croire en l'effacement du châtiment et aussi du méfait, ce qui est impossible. À l'appui de ce développement, Derrida invoque l'aphorisme d'Angélus Silésius : "Le plus (qu')impossible est possible". La théologie négative affirme que Dieu est nécessaire justement parce qu'il est à la place de l'impossible. Absolument impossible à prouver ou démontrer, il occupe ce lieu qu'on peut nommer Dieu. Dans le langage de la juriste amoureuse Portia, une décision aussi majestueuse qu'un pardon ne peut provenir que d'un pouvoir absolu, terrifiant, celui de Dieu lui-même. |
Dans la mise en scène du film de Peter Paul Felner (1927), Le marchand de Venise, la hiérarchie entre les instances est clairement établie : en haut le Doge, puis le docteur de la loi, puis les justiciables : le Juif, Antonio, Bassanio.
Le texte shakespearien rapproche le pardon de la pluie, car tous deux tombent du haut vers le bas. On retrouve cette dimension dans l'Ancien Testemant. Par exemple dans le récit biblique du prophète Elie, dont on connaît l'importance dans la mythologie personnelle derridienne, la pluie interrompue à la demande du prophète ne revient en terre d'Israël que grâce au pardon de Dieu. Dans le monologue de Portia, aussi puissant soit-il, Dieu doit se contenter d'un compromis où "mercy seasons justice", formulation qu'on peut traduire par : la miséricorde tempère la justice (pour que la justice ne soit pas trop dure, trop sévère, il faut qu'elle soit limitée, bordée, bornée par la pitié, la compassion - c'est la leçon que le prophète Elie doit apprendre), la miséricorde est mêlée à la justice (voir traduction ci-contre), ou bien la miséricorde élève la justice (interprétation chrétienne, qui fait du Christ le continuateur spirituel d'Elie, à un autre niveau, encore plus élevé selon Hegel). Cette différence (ou différance) est si importante pour Derrida qu'il en vient à préciser : "Cette mutation est l'enjeu de notre séminaire, bien sûr, depuis longtemps". L'enjeu de son séminaire, c'est la possibilité de l'impossible, l'alliance entre ces deux ordres hétérogènes en tant qu'il produit un mouvement, une mutation. |
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Création
: Guilgal |
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Idixa
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Derrida DerridaPardon HQ.LKD EliePropheteFI.KJD UPossiblePardonImpos Rang = MpardonimpossibleGenre = MH - NP |
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