L'être-juif confie quelque chose au silence, à la garde du mutisme, comme s'il fallait se taire devant une condition ou une situation non descriptible. Il ne s'agit pas de dissimuler sa filiation, il s'agit de protéger un secret, de prendre garde avant de prendre position en tant que juif. C'est ce que Derrida a longtemps fait. Pourquoi ce silence têtu? Quelle faute, quel dommage, quelle blessure congénitale? Quel tort commis? Pourquoi cette dette? De quoi suis-je responsable a priori? Question ouverte, blessure, plaie qui - comme celle de la circoncision - ne se ferme pas.

L'élection est risquée. Décidée par l'autre en moi, dans l'aveuglement, elle ne donne rien à l'avance. Il n'y a pas (ou pas encore) d'appel clair auquel on pourrait rester fidèle : seulement une parole à inventer, à découvrir, sans certitude qu'elle rencontre son destinataire.