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Lorenzo Sargendi - "La pomme de Discorde", Ed : Galgal, 2007, Page créée le 23 avril 2008

 

Olympia (Manet, 1863) -

Edouard Manet

L'Olympia, d'Edouard Manet (1863), Vénus séductrice, est aussi la plus discordante

Edouard Manet
   
   
   
Manet, une discordance interne Manet, une discordance interne
                 
                       

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Alors que le Déjeuner sur l'herbe avait du se contenter du Salon des Refusés de 1863, l'Olympia a été montrée au Salon (officiel) de 1865. Le succès de scandale a été immédiat : pour protéger le tableau, les organisateurs ont dû faire appel aux gendarmes. Ce n'est pas une nudité artistique, c'est la vraie nudité d'une femme vraiment nue (c'est justement ce qui est choquant), avec ce que ça implique de provocation sexuelle et de nudité de notre propre regard qui la regarde. Les détracteurs à l'époque affirmaient que ce tableau n'avait rien à voir avec l'art mais relevait de la caricature ou de l'enseigne commerciale - on ne peut leur donner tout à fait tort. Mais en même temps, il dégage une horreur sacrée. Je la regarde aussi crûment que si elle était un sexe, et elle me regarde, elle aussi, aussi crûment qu'un sexe, tout en gardant ses distances. Nous ne sommes que des sexes. La servante lui propose les fleurs d'un admirateur, mais elle s'en fiche. Elle ne désire pas des fleurs, ce qu'elle désire, c'est qu'on la regarde, car elle est le tableau. Double, à la fois candide et bestiale, elle est un équivalent contemporain de la Venus du Titien et aussi sa profanation. Avec elle, s'étalent les forces obscures de la capitale moderne.

Mais il y a aussi sur elle, pour Manet, quelque chose de très personnel et d'intime : son bracelet à médaillon qui contenait, paraît-il, des cheveux d'Edouard Manet à l'âge de 15 mois, et qu'on retrouve, presque 20 ans plus tard, au poignet de la serveuse du Bar aux Folies-Bergère.

Comme tous les séismes, ce tableau a suscité des répliques en chaînes. Par exemple l'Origine du Monde de Courbet, peint deux ans plus tard, qui le rappelle - et le dépasse - par sa crudité. Ou bien la Moderne Olympia de Cézanne, où le voyeur entre dans la scène.

Sur cette reproduction, on voit mal le visage de la servante noire - sa bouche est ouverte, elle semble étonnée ou au minimum désapprobatrice. On voit mal aussi à quel point le bouquet enveloppé de papier est finement peint - par contraste avec la main olympienne, plus grossière. Tout se passe comme si toute la culture dominante, académique, s'était réfugiée là, du côté ancillaire, laissant la courtisane à ses imperfections.

 

 

On peut supposer que Manet s'inspire de la Vénus d'Urbino du Titien dont la pose est identique, et aussi de la Maja dénudée de Goya. La figure de la Venus est chaste et innocente. Auprès d'elle le chien est un symbole de fidélité et les deux servantes rangent des affaires dans un coffre de mariage. Ici l'Olympia n'a rien d'innocent. Son regard troublant fixe le spectateur, tandis que sa main au modelé vigoureux cache son sexe. L'atmosphère érotique est renforcée par la présence du chat noir à la queue relevée, aux pieds de la jeune fille. Ce chat noir ajouté par Manet, non sans humour, pour remplacer l'innocent chien figurant dans la Vénus d'Urbino, désigne par métaphore ce que la jeune fille cache de sa main. Il traduit aussi, à sa façon, une présence masculine. La Maja dénudée est plus proche des implications sexuelles de l'Olympia, mais la femme n'a pas un regard aussi froid que le modéle de Manet. Goya montrait l'amour-passion, tandis que Manet montre l'amour vénal. C'est la prostitution sous le Second Empire qui est évoquée, un sujet d'autant plus provoquant que le traitement est réaliste. Le caractère désintéressé et hautain de l'Olympia est traduit par le fait que la femme de chambre au second plan se fond avec la couleur du mur. Elle apporte à l'Olympia les fleurs qu'elle vient de recevoir, mais celle-ci n'y prête aucune attention et continue à poser et à aguicher les spectateurs (que nous sommes) d'un regard franc et dépourvu d'ambiguité.

Pour les deux tableaux peints en 1863, Olympia et le Déjeuner sur l'herbe, Manet a utilisé le même modèle, Victorine Meurent. Dans Olympia, elle est entièrement nue, mais ne cherche pas explicitement à choquer, tandis que dans le Déjeuner, elle s'affiche avec insolence. Peut-être Manet a-t-il utilisé des photographies [pornographiques?] de Victorine, et non pas le modèle vivant, ce qui pourrait expliquer son côté statique, froid, professionnel. D'autres éléments de la composition ont perturbé les critiques : le bouquet de fleurs, nature morte s'invitant de manière incongrue dans un tableau de nu, le bracelet (qui appartenait à la mère du peintre !) et l'absence d'une perspective construite. Au XIXs siècle le Nu n'est concevable que s'il est dans un autre espace temps. Dans cette toile, le modèle est fortement individualisé, ce qui s'oppose à la traditionnelle idéalisation. Manet peint ici Victorine avec ses jambes courtes, sa petite poitrine, son menton pointu et son visage carré. Cette individualisation va de pair avec une certaine dureté. Ce personnage ne présente aucune sensualité et la tendresse, la pudeur, l'abandon sont écartés au profit d'une représentation non expressive qui s'observe dans le rendu des chairs.

Georges Bataille a qualifié d'impure cette femme nue et froide. Où se situe-t-elle? Nulle part. Qu'est-elle? Rien. Est-elle vivante ou morte? Entre les deux. Que propose-t-elle? Une ouverture vers un monde incompréhensible, secret. Maudite, réprouvée, c'est une antidéesse, la négation même de l'Olympe dont elle emprunte le nom.

 


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