L'idée d'un commencement absolu est à la base de la phénoménologie. C'est le lieu de la perception ou de l'intuition originelle de soi par soi. Ce lieu n'admet aucune procuration. Il est incompatible avec l'expérience de l'absence, et notamment avec le signe. Quelles que soient les rétentions ou le protentions temporelles, quelle que soit la complexité de la description husserlienne de l'étalement du temps, quelles que soient ses phases, la présence originaire renvoie toujours à cet instant, ce point-source, ce point d'évidence consciente, de sécurité et de fondement, d'archiforme, qui persiste même quand la matière est toujours nouvelle. Ce n'est pas un hasard si Husserl rejette l'après-coup freudien, où la conscience n'est pas contemporaine d'elle-même.

Mais Husserl ébranle lui-même cette assurance. La présence du présent perçu compose continûment avec une non-présence et une non-perception : souvenir et attente. Husserl reconnaît que la rétention peut être considérée comme une rétention passée. Dès lors, dans le clin d'oeil de l'instant (Augenblick), l'autre est accueilli dans l'identité à soi.

Il reste que ce point est le centre, le noyau de la phénoménologie. S'il était démontré qu'il n'est qu'un mythe, toute la démonstration de Husserl s'écroulerait. Ce point de subjectivité absolue apparaîtrait pour ce qu'il est, innommable.