Une préface n'est pas seulement une présentation d'un texte, c'est aussi une structure qui rend compte d'autres effets, des effets "de sens, de concept, d'expérience, de réalité" en rapport avec le texte, mais extérieurs à lui. C'est cette extériorité qui fait de la préface, selon Derrida, "la requête même de l'écriture". Toute écriture est en rapport avec ce qu'on appelle usuellement un référent, des indices - un réel. Ce rapport désorganise l'exposition du sens. Une préface doit dire le texte, le prédire, le prédiquer (une opération idéaliste, téléologique). Mais si elle ne faisait que ça, elle ne servirait à rien, elle n'existerait pas. Elle fait aussi autre chose, elle se dédouble, elle laisse un reste qui témoigne d'éléments étrangers, hétérogènes. Par la préface, l'homogénéité du texte est mise en cause. Il ne se rapporte pas qu'à lui même. Il se fait lieu-limite qui s'approprie le dehors en déstabilisant son rapport à soi. Ainsi le hors-texte, qui déconstruit le texte, est-il dans le texte.