L'objet étrange, suspendu, oblique, qui se trouve au premier plan entre les jambes des deux personnages raides et figés, devant l'étagère où sont étalés toutes sortes de symboles du savoir et de la vanité, c'est quoi? Pour distinguer cet objet flottant, magique, ce fantôme, cette figuration de l'apparence, il faut s'en éloigner. Echappant à la fascination du tableau, on y repère la fonction symbolique du manque.

L'anamorphose peut être comparée à une érection. Dans le temps de la détumescence, voici la tête du mort qui apparaît. A l'époque où le sujet moderne se dessine, Holbein rend visible sa disparition. Dans la fonction pulsatile (gonflement / dégonflement), c'est le regard lui-même qui se dessine.

Contempler un tableau, c'est chercher un regard qui disparaît. Ce n'est pas le sujet de la conscience réflexive qui est impliqué, mais celui du désir. On croit le réduire à un point géométral [le point de vision ou le point de fuite], et il réapparaît au premier plan.

Ce crâne au sol reprend une longue tradition, déjà présente dans les Crucifixions de Fra Angelico.