Artaud revendiquait sa maladresse, qui n'était pas un défaut technique mais le refus du principe même du dessin, le rejet de l'école, de l'Art pour l'Art et des Beaux-Arts. Le dessin n'était pas pour lui une représentation, mais une reprise de possession de son âme, de son corps et de sa main.

Mômo, c'est : 1. le mioche naïf, ingénu, qui naît à Marseille, le fou, l'idiot du village qui produit ce corpus de dessins qui fera ensuite retour au MOMA. La momo est la friandise, le bonbon, et le moma est en catalan l'argent, la monnaie. Il commémore, momifie, au risque de cadavériser. Il fait le procès de la machine qui le détruit, mais l'alimente. 2. c'est aussi le dieu grec de la raillerie, Momos, le bouffon cruel plein de force qui grimace, terrifiant, rythmé par son souffle. Celui-là s'auto-engendre, sans père ni mère, il se déchaîne en blasphèmes et insultes. 3. Artaud était né deux fois, à Marseille et en Grèce, et il devait naître une troisième fois. Pendant les dix dernières, années, il nous réapprend un langage d'avant le langage, de vociférations et de glossolalies, il produit des oeuvres, son oeuvre, des pictogrammes qui défient toute institution.

L'Inca, c'est Artaud lui-même, dédoublé, démultiplié.