On s'est interrogé sur le rapport de Francis Ponge à la chose. Est-ce de l'anthropomorphisme? De la phénoménologie? Certes il fouille en elle, il la décrit, mais il ne la décrit ni de manière objective (comme quelque chose qui se conforme à des lois), ni de manière subjective (par projection). Il ne la considère pas comme un objet naturel, mais comme une injonction impérieuse à laquelle il doit s'assujettir. C'est un duel. Il lui offre sa vie et son désir, sa signature. La chose se tait, mais elle ordonne, elle dicte, elle adresse une demande impossible. On lui doit un respect absolu, sans échange, ni contrat, ni médiation. Il n'y a pas de loi générale, mais seulement la loi de la chose, à laquelle me lie une dette infinie, dont je ne pourrai jamais m'acquitter. C'est à moi de l'inscrire, de mon écriture singulière. J'acquiers ainsi son estime, je peux même en jouir, bien qu'elle reste inappropriable. La mise en abyme semble réussir. Mais elle ne se contente jamais du don que je lui fais. Elle reste irréductiblement autre.