Pour introduire au nom de Hegel, Jacques Derrida choisit deux passages, l'un dans la Phénoménologie (tome 2 pp216-7) sur la religion des fleurs, l'autre dans le Cours d'esthétique (tome 2 p39), sur les colonnes phalliques de l'Inde (lingam) ou de la Grèce (cultes bacchiques). Pourquoi ces deux passages? Parce qu'il a choisi de tirer sur un fil, celui du moment familial dans la systématique hegelienne.

L'adoration indienne du phallus, donc, qui se serait propagée depuis l'Inde vers la Grèce par l'intermédiaire de la Phrygie et de la Syrie, avec les fêtes dionysiaques, les poupées ithyphalliques dont les femmes dressaient le membre en le tirant par un fil, aurait pour origine les colonnes intactes, lisses et inentamées dressées [au nom de Shiva] dans les temples indiens. Elles ne seraient pas restées intactes. On les aurait creusées et dans les ouvertures et excavations ainsi pratiquées, on aurait encastré peint ou tatoué des images des dieux, qui sont les ancêtres des petits temples portatifs des Grecs.

Donc, Jacques Derrida s'intéresse à ces structures parce que, selon lui, le concept de famille de Hegel s'érige à partir de là [une érection pour une érection], et aussi la société, et aussi l'Etat, et aussi la moralité, l'éthique, la Sittlichkeit (traduit par Kervégan comme éthicité). Or la question de la famille est indissociable de celle du phallus.

Ces colonnes, à la forme de tours, ne sont ni des maisons, ni des tombes. Elles sont d'avant, avant la famille, avant l'Etat, et même avant le Klang qui précède lui-même le langage. Indétermination de ces structures phalliques, que Hegel mentionne, mais dont il ne sait que faire.