Selon Nicolas Abraham, il existe des critères qui permettent de distinguer une oeuvre "authentique" de ce qu'il appelle une "imitation creuse". L'oeuvre authentique symbolise des conflits précoces, des affections originelles. Elle les rend intelligibles et les articule "de manière adéquate", dit-il, c'est-à-dire de telle façon que tout un chacun puisse y percevoir, ne serait-ce qu'intuitivement, des conflits qu'il a vécus. Inutile pour cela de reconstituer le passé de l'artiste. L'oeuvre est un être autonome, et l'affect concret qu'elle communique, avec son épaisseur génétique singulière et inconsciente, "se suffit". Si elle est un symptôme, c'est un symptôme de soi-même. Chacun peut le comprendre comme une variante fictive de son propre patrimoine affectif.

Chaque oeuvre renvoie à un pouvoir, celui de l'affect "en acte". Elle restitue un fragment du sens (perdu) de notre autocréation. Si elle est authentique, son inconscient est indispensable à l'articulation esthétique; au contraire une oeuvre inauthentique (qui n'est qu'un cliché, une singerie) n'a pas d'inconscient.