A priori, avant toute adresse à l'autre et à soi-même, il ne peut pas ne pas y avoir, déjà, un engendrement quasi machinique de Dieu. C'est inéluctable. Avant même que Dieu soit né, une machine transcendantale est mise en scène. Même dans la situation la plus "laïque" [ou athée] qu'on puisse envisager, quand ce Dieu n'est pas nommé, quand sa place est vide, malgré son absence, dès lors que le sujet s'adresse à l'autre, il invoque et convoque ce Dieu (inengendré et inengendrable) qui est le témoin de son engagement [dans la parole]. Pour toute forme d'engagement (croyance, simple déclaration, serment, promesse et même en cas de parjure), c'est devant cette place que le sujet s'engage.

Pour qu'il y ait la possibilité de la vérité, il faut nommer une telle place, il faut l'appeler, même si le "nommé de ce nom" (p45) (absent ou inexistant) demeure imprononçable ou innommable. Dieu est "le témoin en tant que "nommable-innommable", témoin présent-absent de tout serment ou de tout gage possibles. Il n'appartient pas seulement à l'histoire de la religion, mais à l'histoire de toute nomination.

"Croyance, foi ou fidélité signifie ici l'acquiescement au témoignage de l'autre - du tout autre inaccessible en sa source absolue" (p52).